samedi 30 octobre 2010

Le Sichuan

 
Excusez notre silence virtuel: on a eu des journées hyper remplies dernièrement! Cette entrée de blog portera donc sur nos deux semaines dans la province du Sichuan, soit: Chengdu - Leshan - Emei Shan - Chengdu - Songpan - Chengdu.  La ville de Leshan possède un attrait très couru des backpackers: un public security bureau qui émet des extensions de visa en 24h, la moyenne étant de 5 à 7 jours dans les autres villes. Autrement, il y a aussi un gros Bouddha géant qui se visite bien, en attendant son visa. Nous disposons donc de trente jours supplémentaires pour partir à la découverte du Sichuan et du Yunnan. Yé!

Avant de rentrer à Chengdu, un petit croche par Emei Shan, une des cinq montagnes sacrées en Chine et ancien lieu de pèlerinage. D'ailleurs, grâce à un phénomène de réfraction particulier, à certains moments on peut apercevoir un halo autour du pic. On raconte que plusieurs pèlerins plongèrent dans le vide, après avoir vu ce qu'ils croyaient être “l'auréole du Bouddha”. C'est ainsi qu'on s'y est fait toute une randonnée, attirés davantage par les paysages à couper le souffle que par ferveur religieuse, vous l'aurez deviné. Emei Shan en deux jours, ça implique plus de 20km dans la première journée, avec 1500m de dénivelé à grimper, une nuit dans un monastère perdu au beau milieu de la montagne, pour finir en beauté avec une dizaine de km le lendemain et un dénivelé de 500m. Ça été particulièrement intense, mais l'éclat du paysage nous le rendait bien.

De retour à Chengdu, après avoir visité la base de reproduction des pandas, craqué sous le charme de ces adorables nounours (et pris un peu trop de photos de pandas, vous nous en excuserez), on a mis le cap vers le nord du Sichuan, en direction de Songpan pour y faire un trek à cheval. La route n'a pas été facile! En chemin, on a dû s'arrêter pendant 7 heures à une station-service... parce qu'ils étaient en train de refaire la route! On peut donc dire qu'on a parcouru un peu plus de 300 km en 15 heures: on bat nos records indiens de lenteur. Heureusement qu'on a rencontré Virva, un Finlandaise avec qui on a jasé un peu, histoire de passer le temps. On a même joué avec des enfants qui étaient, eux aussi, prisonniers dans ce barrage routier. Finalement, ça a passé assez rapidement et comme on s'entendait bien avec Virva, on a décidé de partir en trek à cheval avec elle dès le lendemain.

Ce qui s'annonçait comme trois jours inoubliables l'a effectivement été, mais pas seulement pour les bonnes raisons. Au début, on était sous le charme du spectaculaire paysage, encadré de troupeaux de yaks sauvages et de bébés aux joues rondes bien emmitouflés... Malheureusement, les choses se sont mises à mal tourner. C'est fou comment nos états d'esprits ont passé de hyper contents à hyper déçus en quelques heures, au fur et à mesure qu'on découvrait ce qui nous attendait vraiment. En partant le premier matin, un des guides insistait pour prendre mon sac-à-dos et aller l'installer sur un cheval pour moi. Je me suis aperçu peu après que mon sac avait été ouvert et qu'il me manquait une liasse de billets de 10 yuans. C'est frustrant, mais j'ai choisi d'éviter la confrontation car nous devions passer les trois prochains jours avec ces deux guides. On apprend par la suite qu'on ne fera pas de camping finalement, et qu'on couchera plutôt dans un village tibétain. Ça nous étonne un peu de voir que les règles du jeu changent comme ça sans qu'on soit consultés au préalable, sans compter qu'on était fébrile à l'idée de camper. On a passé la nuit à grelotter, couchés par terre sur un plancher de bois, juste à côté des guides. Pas mal moins romantique que du camping d'hiver... Le lendemain matin, je me suis levée avant les autres pour lire un peu. Un des guides en a profité pour essayer de me faire des avances... Je pense qu'il ne s'est jamais fait remettre à sa place aussi sèchement de toute sa vie. Vous vous doutez que l'ambiance du groupe était alors loin d'être chaleureuse...

De plus, alors qu'on nous avait promis trois repas par jour, on n'en obtient que deux. Heureusement, on avait prévu des collations, mais manger une poignée d'arachides pour dîner quand tu fais une journée de 6-7 heures de plein-air, ce n'est pas assez. Bref, on a trouvé ça très décevant. Il est vrai que les paysages autour étaient magnifiques, mais fallait-il vraiment endurer le froid, la faim et les hostilités de nos deux guides pour avoir la chance de voir cet endroit? Attendez, ça ne fait que commencer.

Lors de la deuxième journée, en fin d'après-midi, les guides décident de marcher et laissent leurs chevaux libres, à l'avant du groupe. Alors qu'on longeait un petit cours d'eau, l'un d'eux s'éclabousse et part à la course. Le cheval de Virva a bondi de surprise, l'éjectant brusquement sur le sol. On a vu avec horreur le corps de notre amie aller se fracasser sur d'immenses roches au bord du ruisseau.

Gravement blessée, elle parvient à peine à marcher et on regagne péniblement le village tibétain. Les guides font comme si de rien était et ne prennent aucune initiative. Quand on demande à l'un d'eux d'appeler un véhicule pour la ramener à Songpan, soudainement, il ne comprend plus l'anglais. On doit littéralement aller prendre son téléphone dans sa poche de manteau et appeler le responsable du trek. Celui-ci semble comprendre la situation, mais demande à parler au guide pour qu'il lui donne notre localisation. Ce dernier choisit plutôt de couper la ligne, prétextant que l'appel lui coûte trop cher! On vous rappelle que pendant ce temps, Virva souffre à côté de nous et à du mal à respirer. Elle apprendra par la suite qu'elle avait deux côtes cassées. Le guide tente obstinément de la convaincre de coucher au village et rentrer le lendemain à cheval tel que prévu. Avec un quotient intellectuel à mi-chemin en celui d'un chien et d'un enfant, il n'a aucune empathie pour elle et ne saisit manifestement pas l'urgence de la situation. On ne s'est jamais senti aussi démunis, faire face à une telle situation d'urgence et être coupés de toute communication, au milieu de nulle part.

On a malheureusement dû avoir recours à l'ultime langage universel et serrer les poings pour se faire entendre. Comme par magie, trois heures plus tard, un véhicule arrivait au village pour nous ramener à Songpan. Non seulement ces opportunistes ne nous ont pas remboursé la troisième journée de trek non consommée, mais ils nous ont réclamé 300 yuans pour le transport, qu'on a évidemment refusé de payer, non pas sans engueulades ni menaces.

On a passé la nuit à Songpan et on s'est levés aux petites heures du matin pour être certains d'avoir des places sur un bus qui rentre à Chengdu, mais en vain. Toutes les places étaient déjà prises! Suite à la suggestion d'une Chinoise qui a compris notre problème, on a pris un bus vers Pingwu, encore plus au nord, en espérant que de là, on pourrait prendre un bus pour Chengdu. La chance a finalement tournée, et malgré un immense détour, on est arrivés à Chendgu 13 heures plus tard. Heureusement, dès le lendemain, Virva a pu recevoir les soins médicaux dont elle avait besoin et ne souffrira pas de complications suite à ses fractures.

C'est clair qu'en acceptant de faire de l'équitation, on accepte aussi les risques qui vont avec. Par contre, on s'attend à recevoir de l'aide quand une situation d'urgence se présente. Ces guides n'avaient ni la débrouillardise ni les qualifications requises pour faire ce qu'ils font. C'est un des éternels questionnement auxquels on fait face en Asie: la destination vaut-elle tout le mal qu'on doit se donner pour y arriver? Les paysages de Songpan sont-ils assez beaux pour qu'on s'impose plus de 24 heures d'autobus pour l’aller-retour, et qu'on accepte de souffrir de la faim, de la soif et du froid pendant trois jours avec des guides incapables de réagir aux urgences pour les admirer?

On a pris quelques jours plus tranquilles à Chengdu, histoire de digérer cette expérience. On recharge nos batteries et on se dirige vers Lijiang, dans la province du Yunnan.

mardi 12 octobre 2010

Yangshuo


Après trois semaines de métro, de foule et de marches interminables à travers trois des plus grandes villes du pays, on s'éloigne enfin de la côte pour s'enfoncer dans la portion continentale. Donc, dans la Chine rurale, voir ancestrale, au rythme plus lent, là où la modernité n'a pas avalé tout le territoire agricole pour y planter ses gratte-ciel? Non, pas tout à fait. L'opération rase-motte fait des ravages un peu partout, même dans les coins qu'on aurait qualifiés de reculés il n'y a pas si longtemps.

Attention, ce n'est pas nécessairement négatif. Le développement à grande échelle de l'Empire du Milieu aura par exemple facilité l'accès aux ressources et aux technologies, aisant communications et transport aux quatre coins du pays. Il aura également revitalisé de nombreux sites et attractions touristiques et du même coup, les villes et villages des environs. Il s'en trouve toujours pour dire que tout cet avancement s'est fait sans tenir compte d'un paquet de facteurs sociaux et environnementaux... J'imagine que l'administration publique y est allée selon l'adage: "Il faut souffrir pour être beau". On pourra mieux en juger dans les prochaines semaines.

La municipalité de Yangshuo est un des "sites" les plus visités de Chine. Qui dit tourisme dit consommation... On y a même trouvé, avec un soulagement quasi hystérique, du beurre d'arachide, une denrée rare que nous n'avions pas revue depuis l'Inde. Décidément, notre séjour ici commence bien!

En plus d'avoir le charme des montagnes, l'endroit regorge de choses à faire et à voir. L'attraction principale de l'endroit est impossible à manquer, la ville est construite en plein dedans. En fait, il ne s'agit pas seulement de la ville mais bien de la toute la région dont le paysage, unique en son genre, est meublé d’impressionnantes formations karstiques. L'attrait de Yangshuo, c'est de pouvoir les admirer tout en profitant de balades sur les rivières Li et Yulong, à bord d'un radeau en bambou. Ensuite, viendront la randonnée en montagne, la marche et le vélo (en tandem pour les couples) pour contempler ces intrigants rochers.

Avec toutes ces possibilités, surtout que la majorité des activités sont payantes, pas surprenant que plusieurs opportunistes usent de beaucoup d'imagination pour avoir leur part du gâteau. Et comme on essaie d'éviter de passer par les agences ou groupes organisés, on découvre rapidement les subtilités d'un système propre à cette ville. La commercialisation des attraits touristiques à Yangshuo est bien particulière.

Par exemple, pour la balade en radeau sur la rivière Li, on doit impérativement passer par un rabatteur qui amènera ensuite le touriste vers l'embarcation. Pour une raison que l'on ignore, son conducteur ne négocie pas directement avec le client. On s'entend ici qu'on paie drôlement plus cher pour rien ou plus justement pour un intermédiaire qui ne sert à rien. Non, ce dernier ne parle pas plus anglais que les autres. Par contre, on a eu droit à une scène amusante quand plusieurs de ceux-ci se sont mis à s'engueuler entre-eux pour déterminer de qui "nous avait vus en premier".

Autre exemple, il existe une ou plusieurs grottes inondées à visiter dans les environs mais personne ne sait combien ni comment s'y rendre et cela semble voulu ainsi. On remarque d'ailleurs de l'information biffée sur certains panneaux de circulation... La seule façon d'aller visiter est d'acheter son billet dans un des kiosques, répandus un peu partout en ville, qui promettent d'amener leurs clients à la seule "vrai" grotte. Leurs affiches annoncent: "Beware of the fake", "The only real Water Cave" et autres slogans du genre où chacun se targue d'avoir la meilleure offre. Le prix d'entrée étant assez élevé, c'est un pensez-y bien avant de dépenser une petite fortune pour une activité qui pourrait être autant son coup-de-cœur qu'une profonde déception. De notre côté, nous avons eu la chance de tomber sur une bonne affaire et nous avons adoré notre expérience. En plus d'une bonne marche à l'intérieur de la grotte, nous avons eu droit à un trio de baignade soit dans l'eau claire (et froide), dans la boue et finalement dans une source thermique. Extraordinaire.

Ce qui est bien avec la Chine, c'est qu'il y a des attraits touristiques partout. La première journée où l'on a loué des vélos, on s'est complètement perdus en cherchant un certain moon hill, mais on est quand même tombés sur le pont du Dragon de Jade. Une attraction plutôt méconnue des touristes... Que plusieurs confondent avec un autre célèbre pont, celui de la rivière Long. Ce dernier, personne n'en connaît le nom véritable car les habitants du village l'appellent également le pont du Dragon de Jade pour attirer les touristes et leur proposer des balades sur la rivière. Le plus drôle est que le mot "Long" en mandarin signifie dragon... Pas étonnant que les touristes soient aussi confus!

Jusqu'à présent, parcourir de longues distances en Chine n'était pas trop éprouvant: il existe des trains rapides sur les liaisons entre les grandes métropoles, permettant de parcourir 1500km en une dizaine d'heure. Ce n'est pas la même chose quand on parle de villes plus modestes comme Chengdu, seulement une dizaine de millions d'habitants! Alors qu'on se préparait déjà mentalement aux 24h de train qui nous séparent d'elle, on est tombés sur des billets à 70% de rabais... Pour 10$ de plus que le train, nous atteindrons donc la principale ville du Sichuan par voie aérienne, en 1h30!

jeudi 7 octobre 2010

Shanghai



Si Beijing est une ville moderne, alors Shanghai est carrément futuriste. La mégapole s'est développée à toute vitesse: plus de 3000 tours et gratte-ciel se sont construits en moins de 10 ans. Elle est donc plus froide et ne dispose pas du charme historique de son aînée. Shanghai se contente d'être la petite soeur snob et rebelle, avec ses innombrables magasins de luxe et ses quatre Starbucks par quartier. Une ville à côté de laquelle on ne voulait pas passer, mais où l'on ne se sent pas tout à fait à notre place en chaussures de randonnée et en t-shirt de microfibre. Deux aventuriers dans la ville!

Petite anecdote: on a manqué notre train pour Shanghai, on attendait à la mauvaise gare.  On s'est rendu compte de notre erreur environ 20 minutes avant le départ: s'en suivit une course folle dans le métro de Beijing, mais en vain. On a dû opter pour la liaison suivante: un train de nuit. On a réussi à faire échanger nos billets facilement, sans pour autant comprendre qu'il ne restait pas de couchettes ni de places assises. On a eu la surprise en entrant dans le train, quand une préposée a regardé nos billets et nous a invités à se prendre un morceau de papier journal et à aller s'asseoir par terre à l'avant du wagon...

L’Exposition Universelle de Shanghai est vraiment faite à l'attention des Chinois: peu d'explications en anglais, des présentations strictement en mandarin... Bref, on en a eu amplement d'une seule journée. Les files d'attente étaient ahurissantes! Par exemple, pour entrer au pavillon du Japon, il nous aurait fallu attendre 5 heures. On passe au plan B, le Kazakhstan! Sans blague, on a vraiment aimé ce pavillon là. Ça donne presque le goût d'y aller... Évidemment, on n'a pas réussi à visiter tous les pavillons et on s'est contenté d'en admirer l'extérieur dans la plupart des cas. Un véritable concours d'architecture! Comme si tous les pays s'était donné comme mandat d'avoir le pavillon le plus original. Il y a comme un malaise dans certains cas quand on pense à l'argent dépensé dans ces pavillons... La Lettonie a volé la vedette avec son spectacle de skydiving: un projet qui a coûté six millions de dollars, une somme toute sobre comparée aux dépenses des autres pays.  Pour sa part, le Canada, avec un gargantuesque budget de 58 millions, a réussi à construire un gros truc en bois et y vendre de la poutine en y faisant jouer de la musique pop. Bravo!

Autrement, on a eu droit à l'ultime bain de foule chinois en allatn se promener sur la Nanjing donglu en pleine fête nationale, soit le 1er octobre. Outre le traditionnel salut au drapeau télévisé sur la place Tian'anmen et la quantité incroyable de gens déferlant sur les rues, on ne sent pas tant que ça l'ambiance festive.  Tout comme on ne sent pas du tout le communisme jusqu'à maintenant... Outre la censure internet, bien sûr.  Les couches socio-économiques sont aussi bien définies qu'ailleurs et en voyant le rythme auquel les tours à condos se développent, personne ne remettrait en question ici l'existence de la propriété privée. L'écart entre les pauvres et les riches est parfois saisissant: des gens vident les poubelles devant les magasins huppés dans le quartier chic de Xintiandi. On est bien loin du modèle de Marx!

Pour avoir une meilleur idée du communisme en Chine, il faut chercher plus loin.  On découvre alors que bien que les Chinois aient le droit de posséder maison ou commerce, c'est le gouvernement qui approuve tous les prêts bancaires.  De plus, on peut être propriétaire d'une bâtisse mais jamais du terrain qu'il y a en dessous: chacun des 9,6 millions de kilomètres carrés du pays appartient au Parti Communiste Chinois. Finalement, les sites internet de réseautage ou d'information tels que Facebook, Twitter, Youtube et Wikipédia sont inaccessibles, alors que tous les médias chinois appartiennent également au parti et véhiculent une image positive de ce dernier. Un peu partout, on voit des soldats en uniforme qui font des rondes en marchant d'un pas parfaitement synchronisé, histoire de faire respecter l'ordre public. Sur une note plus légère, cela ne nous a pas empêché de partager quelques Tsingtao dans un parc avec deux Québécois rencontrés à l'Expo...

Sérieusement, même si je me moque de son pavillon à l'Expo, il faut que je le dise haut et fort: "Vive le Canada!". Voyager, ça fait réaliser à quel point on est chanceux d'être nés là-bas. On le prend parfois pour acquis... Par exemple, on jasait avec des Israéliens rencontré à l'auberge de jeunesse de Beijing.  On leur disait à quel point on avait aimé notre expérience au Bangladesh.  Ils nous ont répondu qu'ils aimeraient bien y aller un jour, mais que comme ils sont nés en Israël, l'accès à ce pays leur est interdit, ainsi qu'à d'autres pays musulmans comme le Pakistan et la Malaisie. Similairement, les Américains doivent payer leur visa le double du prix dans plusieurs pays. Heureusement pour nous, tous le monde semble aimer les Canadiens!