jeudi 30 décembre 2010

Le Cambodge



Souô Sadaï!


Pour vous donner une idée, le Cambodge emprunte un peu de chaque pays qu'on a visité précédemment. D'abord, comme en Inde, on dénote l'aspect chaotique et délabré de certaines villes ou quartiers (on remercie les Khmers rouges pour leur contribution) mais aussi la jovialité des habitants. Ensuite, comme en Chine, on est frappés par le fossé qui sépare les gens riches des gens pauvres, spécialement à Phnom Penh, la capitale. Enfin, comme au Laos, le peuple Khmer est infiniment aimable et accueillant, en ville comme à la campagne.


Le passé récent du Cambodge semble provenir tout droit d'une trilogie de films aux scénarios tordus, racontant une histoire aussi horrible qu'incroyable. Comment l'Homme a-t-il pu en venir à aller de l'avant avec un plan aussi macabre et auto-destructeur que celui initié par les Khmers Rouges? Les responsables sont pourtant des gens bien instruits, envoyés en Occident dans des universités renommées. Comment expliquer que ces derniers aient cru en des idéaux allant à ce point à l'encontre du progrès économique et social? On parle ici d'un auto-génocide, soit la décimation de plus de 2 millions de personnes, souvent les plus instruites ou encore celles qui avaient le malheur de porter des lunettes! Justice aurait pu être rendue lors du procès des principaux dirigeants Khmers rouges en 2009 mais une série d'incidents seraient venu perturber les procédures (pensez corruption, partialité, disparition de documents, etc.).


Bien que cette période noire soit maintenant chose du passé (quoique seulement 30 ans derrière), plusieurs considèrent que ce n'est que depuis 1998 que la situation s'améliore réellement pour les Cambodgiens. Cette année-là marque l'élection du premier ministre actuel ainsi que la mort de Saloth Sar, alias Pol Pot, le leader du mouvement communiste cambodgien des Khmers Rouges. Comment se porte le Cambodge d'aujourd'hui? De notre point de vue, plutôt bien. Les cicatrices d'hier sont encore visibles, on remarque plusieurs bâtiments délabrés ou abandonnés mais ceux-ci sont graduellement remplacés par des hôtels, restaurants, salon d'esthétique ou bars branchés. Comme partout ailleurs en Asie, le contraste est à l'honneur, conséquence d'un développement urbain inégal. En autant que la stabilité politique et sociale tienne le coup, le Cambodge se relèvera tranquillement de sa période sombre. On dénote également un profond respect dans l'air, vestige d'un génocide encore trop frais dans bien des mémoires. Ici, davantage qu'au Laos, on accueille et on remercie autrui avec les mains jointes sous le menton et la tête légèrement baissée.


Comme pour le Laos, il était difficile de se faire une idée claire du pays avant d'y entrer. Disons que ni un ni l'autre ne suscite tellement d'intérêt du monde occidental et quand les médias s'y attardent, c'est souvent pour parler d'une catastrophe. Heureusement, ces deux pays ont été épargné par Dame Nature ces dernières années alors que des inondations importantes ont été recensées chez leurs voisins thaïlandais et vietnamiens. Et heureusement pour nous, les mois de novembre et décembre sont plutôt secs dans ce coin du monde.


Premier arrêt après avoir passé la frontière: la ville de Kratie (prononcer Kratchey). On adopte d'emblée la moto comme mode de transport, puisque la liberté qu'elle nous accorde crée un forte dépendance! Un peu au nord de la ville, on a eu le plaisir d'aller chasser le dauphin d'eau douce, munis d'une caméra et non d'un harpon, bien entendu.


À partir d'ici, pour ne pas trop allonger le texte et éviter que vous vous endormiez dessus, voici un résumé des faits saillants de notre séjour au Cambodge. Après Kratie, nous nous sommes dirigés vers la ville de Phnom Penh qui nous a tout simplement charmés à cause de sa promenade le long du Tonlé Sap, de son histoire, de ses petits restos bien inspirés et d'une curiosité que j'arrive à peine à m'expliquer: l'omniprésence d'occidentaux. Le Cambodge accueille de nombreuses ONG et la plupart sont basées dans la capitale, on se croirait presque dans une ville européenne! Le coût de la vie est encore très bas au pays de l'Angkor Wat tandis qu'en France... En parlant des temples d'Angkor et des environs, l'éloquence des photos rend toute description superflue. Grandiose, magique, magnifique, vous choisirez votre qualificatif. Probablement les trois.


Quelques jours plus tard, nous étions déjà rendus sur le littoral cambodgien afin de profiter des plages et surtout, des succulents fruits de mer de toutes sortes vendus à des prix très modestes. Crabe, crevettes géantes et même du barracuda se sont succédés dans nos assiettes, le plus souvent assis juste au bord de la mer. Un véritable calvaire! Par la suite, on a eu un droit à un avant-goût de la Thaïlande à Sihanoukville, seule vraie station balnéaire du pays, qui se mérite le titre de perle d'Asie du sud-est. Nous n'y avons passé que deux jours mais on aurait facilement pu y lézarder une semaine avec sa belle plage de sable blanc qui, après avoir accueilli un sublime coucher de soleil, se transforme en immense terrasse sur laquelle sont placés fauteuils ronds et tables basses pour un souper sous les étoiles, les deux pieds dans le sable.


Dernier arrêt au Cambodge, la ville de Siem Reap sert principalement de base pour la visite des temples d'Angkor mais ce n'est pas tout. Le centre touristique est un endroit formidable pour terminer cette partie du voyage en beauté, grâce à son animation et son ambiance digne du Vieux-Montréal lors d'une soirée chaude du mois de juillet. Le massage des pieds par des poissons est une expérience unique qui restera longtemps gravée à nos mémoires! Dans un autre ordre d'idées, je vous encourage à visiter le site internet de Santepheap pour vous donner une idée des formidables projets qui sont mis sur pied ici pour venir en aide aux plus démunis. Cette organisation est entièrement dévouée à l'éducation des enfants des villages éloignés, autant sur le plan scolaire que social et culturel. Nous avons pu le constater en passant une journée dans leurs locaux à aider les enfants pendant leur cours d'anglais et en assistant au spectacle de danse traditionnelle khmère de grande qualité qu'ils ont préparé. Malgré le manque évident de ressources matérielles, humaines et financières qui affligent leur école, nous avons été touchés par leur enthousiasme et leur désir d'apprendre.

vendredi 10 décembre 2010

Le sud du Laos


Avec la ferme intention de rendre notre expérience laotienne plus authentique, on a loué une moto pour quelques jours. Comme en Inde, mais avec des casques cette fois-ci! Ça a été fabuleux de retrouver notre indépendance et surtout de s'affranchir des autobus. Il y a d'autres éléments qu'on ne saurait éviter par contre, comme les policiers corrompus! Le premier matin, Fred fait comme tous les autres Laotiens et grille un feu rouge. À l'instant même, un policier assis sur une chaise en plastique à côté de l'unique feu de circulation de la ville siffle et nous pointe. On ne l'a pas vraiment pris au sérieux, comme on dit, tout le monde fait ça ici, et on a donc continué notre chemin. Moins d'une minute plus tard, on était poursuivis par quatre policiers à motos... « Heum, Fred? Je pense qu'on devrait s'arrêter... » On niaise un peu avec les représentants de la loi pendant qu'ils nous expliquent (en Lao) notre grave offense et font semblant de savoir lire ce qui est écrit sur le permis de conduire de Fred et les papiers de la moto. C'est clair qu'ils veulent de l'argent, mais personne n'ose se mouiller en proposant un montant en premier. Finalement, c'est presqu'en regardant par terre que l'un d'eux nous demande une amende de 50 000 kips. Un gros 7$CAN... Ok!

Basés à Paksé, on est partis à la découverte du wat Pou à Champasak, ainsi que de quelques chutes d'eau dans le plateau des bolavens. Le moment fort de ces quelques jours, que dis-je, de notre voyage en entier fut très certainement notre séjour à Ban Papho, un petit village dans la zone nationale protégée de Se Pian. Se balader à dos d'éléphant figurait sur notre liste de choses à faire en Asie et bien qu'on aurait eu la possibilité de le faire plus tôt, on n'avait pas encore trouvé d'endroit qui nous convenait. Dans la plupart des cas, offrir des ballades à dos d'éléphant consiste en une activité lucrative où les mastodontes en question se font donner un minimum de soins et de nourriture, pour maximiser les profits. L'idée qu'un éléphant reste enchainé jusqu'à ce qu'un touriste réclame une ballade nous était insupportable. On ne voulait surtout pas encourager de telles entreprises.

Depuis des générations, le village de Ban Papho possède quelques éléphants entraînés à aider les villageois à accomplir certaines tâches, surtout pour déplacer des charges trop lourdes pour l'homme. Ils prennent donc grand soin des éléphants, qui sont hautement appréciés pour leur contribution, au même titre que les buffles d'eau qui travaillent dans les rizières par exemple. Un éléphant faible et malheureux n'est pas un éléphant productif!

On voulait de l'authenticité et on a été servis. Il n'y a qu'une seule guesthouse à Ban Papho, avec moins de chambres que de doigts sur une main, et le proprio entend bien garder les choses telles qu'elles sont. Les occasionnelles ballades à dos d'éléphant sont une source de revenus supplémentaires pour le village mais ne deviendront jamais la norme.

Pour en venir au vif du sujet, la ballade elle-même a été incroyable. Il faut dire que la réserve de Se Pian offre un arrière-plan hors du commun! On était les deux sur le même éléphant, une personne assise sur son dos, dans un espèce de panier, puis l'autre à l'avant, directement sur son cou. C'est formidable de toucher l'éléphant et de sentir ses omoplates bouger à chaque pas qu'il fait. On a été ébahis à plusieurs reprises par l'intelligence de ce beau gros pachyderme, qui obéissait au doigt et à l'oeil à son mahout. La baignade a été particulièrement agréable et surprenante, les photos parlent d'elles-mêmes. Elle avait l'air bien contente notre éléphant de se rafraichir et de se faire donner autant d'attention! Puis, moment magique quand vient le temps de remonter à bord: elle place sa patte avant de sorte à ce qu'elle soit parallèle au sol, nous faisant la courte échelle pour nous aider à grimper sur son dos! Bref, un éléphant des plus heureux et un plaisir fou qu'on a pu savourer sans culpabilité.

Avant de traverser au Cambodge, on s'est arrêtés à Siphandon, « les 4000 îles », juste avant la frontière. Imaginez le Mékong. Des pirogues à moteur qui voguent à contre-courant. Au fond, vous voyez des collines verdoyantes. Ajoutez quelques buffles d'eau et des rizières à perte de vue. C'est beau non? Ça l'est encore plus en réalité. Bienvenue sur l'île de Det. Un environnement comme ça, ça donne envie d'arrêter le temps et de rester sur place indéfiniment. On se contentera d'une semaine! Avec notre bungalow sur pilotis donnant sur l'eau – côté sunset, bien sûr - on a passé une semaine bien tranquille. Tranquille jusqu'à ce que la corde du hamac de Fred se rompe et qu'il se retrouve le dos sur le ciment... Ouch! Heureusement, plus de peur que de mal, quelques éraflures mais rien de bien grave. Autrement, Fred vient de franchir le dernier stade du processus laborieux de se laisser pousser les cheveux, la phase où ils ne sont ni courts ni longs et que tu as l'air d'un Beatles et/ou de Jésus. Il peut maintenant les porter attachés et ça lui va plutôt bien!

jeudi 2 décembre 2010

Vang Vieng et Vientiane


Le Laos, on aime ça, mais... ça ressemble trop à des vacances! On n'est pas partis un an en Asie pour se la couler douce, or c'est inévitablement ce qui se passe ici. On est au royaume du tourisme où tout est facile et accessible: les chambres sont propres, le personnel tout le temps bilingue, la bouffe excellente, les activités encadrées... J'imagine que c'est bien quand tu pars en voyage deux semaines, à la recherche d'un peu de bon temps, mais nos motivations sont toutes autres. Il y a une satisfaction inouïe à réussir à commander à manger dans un resto où personne ne parle ta langue, à trouver soi-même quel autobus prendre dans une gare locale bondée ou encore à se faire inviter à prendre le thé par un paysan dans un petit village en retrait de la ville. Ce n'est malheureusement pas au Laos que ça va se produire de nouveau.

On rouspète un peu contre tout ça mais par contre, tant qu'à être ici, aussi bien entrer dans le jeu, ce n'est pas désagréable quand même. On en profite pour faire plusieurs activités: escalade, cours de cuisine, descente de la Nam Song en tube (on s'est baignés avec des buffles d'eau!) et j'en passe. On a même pris un sauna avec des moines! Rassurez-vous, c'est arrivé par pur hasard, on était au sauna local et les moines sont venus y faire leur visite quotidienne. Évidemment, au rythme où le tourisme se développe au Laos, ça ne serait pas surprenant de voir que des agences de voyage organisent de telles activités... « Pour seulement 50 000 kips, prenez un sauna avec des vrais de vrais moines »! N'empêche que c'était une joyeuse bande, les moines. Le plus jeune devait avoir 10 ans, le plus vieux 50 ans et ils se faisaient des blagues sans cesse. Il y avait une fraternité touchante entre eux. C'est grâce à eux qu'on sait maintenant comment dire « deux mètres » en Lao: song met! Dites ça dans un petit village laotien en pointant Fred, succès assuré auprès des petits et des grands.

Vang Vieng, on adore ou on déteste. C'est le quartier général des backpackers au Laos, où l'accent est loin d'être mis sur l'échange culturel ou la découverte de la nature. C'est plutôt l'alcool et la drogue qui sont à l'honneur. On retrouve des dizaines de petits restos qui ont troqués leurs tables et chaises pour des coussins éparpillés sur le sol, devant un écran géant qui joue des épisodes de Friends ou Family Guy du matin au soir. C'est la capitale du laisser-aller: ça se promène en bikini sur la rue. De plus en plus de gens se massent sur la place principale vers 18h pour assister au retour des backpackers saouls qui n'ont pas pu terminer la descente de la rivière en tube, n'ayant plus tout à fait contrôle d'eux-mêmes. De toute beauté!

Vientiane, la capitale, est une grosse plaque tournante pour entrer ou sortir du Laos en raison de son aéroport international ainsi que du pont de l'amitié, qui rejoint la Thailande par dessus le Mékong. Un gros bouillon de backpackers mais aussi beaucoup d'expats, en passant par les couples louches, du genre un homme occidental bedonnant dans la quarantaine et une superbe laotienne dans la vingtaine. On s'est promenés dans la ville, on a photographié plusieurs wats et visité le Buddha Park, un ensemble de sculptures assez récentes qui empruntent des éléments au bouddhisme et à l'hindouisme. Pas d'activités bien excitantes à Vientiane donc (quoiqu'en disent certains hommes dans la quarantaine...), on se rappellera surtout l'enthousiasme fébrile des Laotiens au salon de quilles de la ville. Une belle soirée!

Sur ce, on se dirige vers le sud du Laos, qui est sensé être moins touristique selon les dires d'autres voyageurs rencontrés cette semaine. En attendant, on vous laisse sur une petite bande-dessinée illustrant le comportement à adopter en tant que backpacker responsable au Laos. À suivre!



lundi 22 novembre 2010

Luang Namtha et Luang Prabang


Sabaidee!

Nous sommes présentement au Laos depuis le 12 novembre. On était un peu nostalgiques en traversant la frontière sino-laotienne, c'est qu'on a eu avec la Chine une relation amour-haine, tout comme avec l'Inde. C'est le prix à payer pour vivre un dépaysement total; donnez-nous deux semaines encore et on va s'ennuyer du thé vert et des masseurs aveugles... D'ailleurs, en soupant dans un resto indien à Luang Namtha, Fred et moi nous sommes avoué, entre deux bouchées de channa masala, qu'on s’ennuie de l'Inde. On parle même d'y retourner un jour... Il faut croire que le bruit et la saleté n'ont pas eu raison de nous.

Bon, pour en revenir à nos premières instants au Laos, c'est particulier, il y a comme une zone grise entre les deux frontières. On obtient notre étampe de sortie de la Chine, puis on doit marcher quelques kilomètres le long de la route avant d'arriver au poste frontalier du Laos. Le soleil plombe et on se pose toutes sortes de questions: si l'on est ni en Chine, ni au Laos, on est où là? Qu'est-ce qui se passe si on commet un crime? Où si le Laos refuse de nous accorder le visa? Tant de questions humoristiques avec un fond de vérité qui resteront sans réponse puisque le visa laotien s'obtient avec une facilité remarquable. Tu sors l'argent et hop! C'est fait en moins de deux, sans poser de questions. D'ailleurs, les Canadiens paient plus cher que toutes les autres nationalités pour ce visa. Quelqu'un peut-il nous éclairer là-dessus? Y aurait-il un immense malaise diplomatique qui nous échappe?

Arrivés à Boten, première ville du côté du Laos, on a échangé nos yuans contre des kips. Ici, nous serions tous millionnaires puisqu'un dollar canadien vaut environ 8 000 kips. Ça fait drôle de faire des retraits d'un million au guichet, ou encore de payer son souper avec un billet de 50 000!

Plus tard, alors qu'on essayait sans grand succès de négocier le coût du trajet jusqu'à Luang Namtha, deux Ukrainiens (!) qui passaient dans une camionnette nous ont offert de monter avec eux, gratuitement. On n'a pas vraiment réussi à comprendre ce qu'ils faisaient ici, mais à chaque point de contrôle ils offraient chips et bière aux policiers pour s'éviter la fouille du véhicule. Ça veut tout dire!

On en a presque oublié de reculer nos montres, au Laos, il est une heure plus tôt qu'en Chine. En réalité, c'est plutôt un bond de cinquante ans en arrière qu'on fait en changeant de pays. La différence est frappante, surtout en terme d'infrastructures et de véhicules. On a eu l'occasion de pédaler du côté des petits villages et à chaque fois, c'est un tourbillon de Sabaidee, de sourires et d'enfants qui courent qui nous attend. C'est vraiment agréable et l'atmosphère est définitivement plus détendue de ce côté-ci de la frontière.

Avec ses nombreuses aires protégées, rivières et formations karstiques, le pays est reconnu pour son tourisme d'aventure, avec un penchant vers l'écotourisme. On compte bien en profiter et on a choisi de commencer avec une journée de kayak sur la Namtha, dans les rapides. Avant de partir, on a été au marché local avec Sython, notre guide pour la journée. On a goûté à des larves grillées et assemblé un pique-nique pour le lunch. Au menu: riz collant, légumes verts et poisson grillé sur un feu de camp, un vrai délice.

Vous verrez également dans l'album quelques photos de Luang Prabang, une ville qui été sacrée toute entière patrimoine mondial de l'Unesco. Un endroit charmant, qui rappelle l'époque coloniale française. On y serait bien resté un peu plus longtemps pour profiter de cette belle ambiance, mais on a dû s'enfuir après seulement 24h histoire de ne pas faire exploser notre budget!

lundi 15 novembre 2010

Le Yunnan


Yunnan signifie “au sud des nuages”; un proverbe chinois dit que lorsqu'on se rend au bout du monde, on y est pas encore tout à fait rendu. C'était sûrement vrai quand on croyait que Chine et univers étaient synonymes mais de nos jours, l'endroit est loin d'être difficile d'accès. Il s'agit simplement de la province la plus au sud du pays et donc pour nous de la dernière étape avant de pénétrer au Laos.

Pour vous mettre en contexte, le Yunnan est la province la plus pauvre de la Chine et celle où vivent le plus grand nombre de minorités ethniques au pays (par opposition aux Han, les “vrais” Chinois). C'est aussi ici, selon nous, que l'on trouve les gens les plus sympathiques. La plupart nous saluent systématiquement, arborant leur plus grand sourire.

Grâce à une compétition féroce entre les compagnies aériennes, à un immense bassin de population et une fréquence de vols s'approchant de celle des passages d'un métro, nous avons (encore une fois) pu nous offrir des billets d'avion au prix d'un trajet de train. C'est donc de cette façon que nous avons quitté la ville de Chengdu pour rejoindre celle de Lijiang. En prime, nous nous sommes épargné un assommant 22h de transport en autobus réparti sur trois étapes, sans parler du plaisir de voir, entendre et sentir nos amis chinois régurgiter leur soupe aux nouilles, intestins et scorpions séchés dans un petit sac de plastique (ça arrive à plusieurs, sur chaque trajet). Des sacs en plastique sont d'ailleurs systématiquement distribués à tous les passagers avant le départ. Pour aider à l'envie de vomir (ou changer l'odeur), chaque passager de sexe masculin s'allume au minimum une cigarette aux quinze minutes. Autobus, restaurant, salle d'attente, les Chinois fument partout, tout le temps, comme des cheminées. Un peu comme les Indiens qui chiquent!

Bon, où en étais-je? La ville de Lijiang est un labyrinthe de ruelles tortueuses bordées de vieilles maisons basses en bois de couleur rouge vin à travers lesquelles (les ruelles, pas les maisons) serpentent des petits ruisseaux qu'on enjambe à l'aide de petits ponts en pierre. Charmant. La minorité ethnique installée ici sont les “Naxi”. Leur mode de vie repose sur des traditions ancestrales et matriarcales et ils font un excellent fromage de chèvre! Voilà, c'est à peu près tout ce qu'on sait sur la ville et ses habitants. De tout façon, la raison principale de notre visite se trouve encore à quelques heures de route de Lijiang soit “la gorge du saut du tigre”. Étirée sur une trentaine de kilomètres, elle est le théâtre d'une magnifique randonnée à flanc de montagne avec pour toile de fond un paysage époustouflant dominé par des sommets de 5000 mètres. L'objectif de cette randonnée étalée sur deux jours est de se rendre au point le plus étroit de la gorge, large d'environ 30 mètres. Selon la légende, c'est là qu'un tigre l'aurait franchie d'un seul bond, pour échapper à un chasseur. La randonnée fut très satisfaisante avec des sections à difficultés variables dont le segment le plus éprouvant jamais parcouru par vos deux voyageurs (!) dans la montée entre les rapides et la route. Le point de vue d'en bas en valait la peine et les sueurs.

Ensuite, nous nous sommes dirigés vers Kunming. La capitale du Yunnan est une autre ville désespérément moderne bâtie autour d'un centre-ville aux allures d'immense centre commercial. En réalisant que nous approchions de la fin de notre séjour en Chine, c'est ici que certaines constatations se sont confirmées. D'abord, sur la gastronomie chinoise. Pas celle des restos chics mais celle de rue, que la majorité peut s'offrir donc, disponible à tous les cent mètres. Après plusieurs semaines à essayer, on capitule. Il faut le dire, les Chinois ont des goûts bien trop différents des nôtres. Épices et textures, c'est toujours trop ou pas assez et la plupart du temps, ça baigne dans l'huile. Rien à voir avec la cuisine chinoise qu'on a l'occasion de déguster à Montréal dans le quartier chinois. Et que dire de la variété, ou l'absence de. D'une échoppe à l'autre, c'est du pareil au même. Un tas de nouilles dans un bouillon huileux avec quelques pousses et des morceaux de porc. Sans oublier la viande de yak séchée! Heureusement, une particularité chinoise nous permettait de temps à autre de combler une petite fringale: les vendeurs itinérants de châtaignes et de patates douces attendent patiemment les clients sur le trottoir avec leur petit kiosque sur roulettes. Le seul “hic”, c'est que la plupart n'ont pas de permis pour ce qu'ils font et doivent donc constamment être sur leurs gardes au cas où les forces de l'ordre se pointeraient le bout du nez. On eu droit à toute une scène quand une vendeuse de patate s'est fait surprendre par la police à côté de nous! On aurait dit qu'elle courait pour sa vie. La punition doit être horriblement sévère pour ceux qui se font prendre... 

Notre deuxième désillusion face à la culture chinoise a trait au contact avec les autres. C'est bien dommage mais le rêve de se promener dans un village et de se faire accueillir à bras ouvert par les habitants qui nous invitent à prendre le thé et un bon repas chez eux ne se réalisera pas en Chine. Est-ce à cause d'une culture un peu plus fermée qu'on le croyait, d'un déjà trop grand flux de touristes même dans les régions plus éloignées? Peut-être d'une vision utopiste de la vie chinoise en campagne? Probablement un peu de tout ça. À bien y penser, un scénario identique au Canada, où les nationalités sont inversées n'est pas vraiment réaliste non plus.


À partir de Kunming, en descendant vers le sud, le paysage change rapidement. Les montagnes demeurent mais le gris et blanc des sommets enneigés fait place au vert d'une végétation plus tropicale. Les plantations de bananiers et les rizières en escaliers couvrent maintenant la majeur partie du territoire. On remarque aussi que les physionomies changent, les joues sont moins joufflues et que la peau prend quelques teintes de doré. À Jianshui, une étape à priori banale qui s'est avérée charmante, nous avons passé un avant-midi complet à nous balader dans les rues du quartier musulman pour échanger quelques mots et poignées de main. On pouvait sentir leur enthousiasme d'échanger un rare moment avec des étrangers. Les enfants chantaient et dansaient autour de nous. Le soir venu, on se retrouve assis dans une petite gargote de quartier autour d'un excellent repas dont nous avons nous même choisi les ingrédients! On en rêvait depuis des semaines. Le principe est simple: les aliments sont tous présentés dans un réfrigérateur (style supermarché) et il ne reste qu'à pointer. Pas de mauvaise surprise, pas de bœuf haché dans notre plat de tofu. Croyant avoir trouvé la seule perle rare, nous avons commandé assez de plats pour en avoir pour déjeuner et pour dîner le lendemain. Il fallait bien être rendus à la fin du segment chinois de notre périple pour commencer à apprécier leur bouffe! 

Pour ajouter à l'ironie, c'est le même genre de scénario qui nous attend à notre prochaine destination, Yuanyang. D'abord attirés là pour admirer les fameuses rizières en escaliers, le village nous a conquis à cause de ses habitants, encore une fois hyper chaleureux. On nous a même invité à prendre le thé! Bien que ce fut assez bref et plutôt laborieux sur les échanges verbaux, nous sommes très heureux de la tournure des événements. Ensuite, pour un troisième soir d'affilé, nous avons la chance de tomber sur un de ces restaurants familiaux où réfrigérateurs, cuisine, salle à manger, clients et animaux de compagnie sont réunis dans une même pièce. Les plats sont simples mais avec une bonne portion de riz et une bière froide, ces repas sont les meilleurs de Chine. Et comme c'en est devenu une habitude, on en garde pour le lunch du lendemain.

À partir de Yuanyang, 18h de bus et 530 kilomètres plus tard nous amènent à Jinhong, une splendide ville de la région mythique du Xishuangbana. Elle est encore peu fréquentée par les touristes parce qu'elle a longtemps été très difficile d'accès mais depuis qu'une autoroute la relie à plusieurs autres grandes villes, ce n'est qu'une question de temps avant qu'elle devienne une destination de choix autant pour les Chinois que pour les étrangers. Les trottoirs sont tous larges et bordés de palmier, et le mercure grimpe facilement jusqu'à trente degrés. Pour les Chinois, c'est comme se rendre dans un pays du sud-est asiatique sans traverser la frontière et pour les voyageurs, c'est une halte incontournable sur la route du Laos.

Autrement, bien que ce soit possible dans d'autres villes chinoises, on a finalement essayé une particularité, voire étrangeté chinoise: les masseurs aveugles. Il faut dire que même si l'idée est géniale (donner une formation de massothérapeute à de jeunes handicapés visuels et leur permettre de gagner leur vie de façon autonome), il y a quelque chose d'intimidant à recevoir un massage par un non-voyant. Quelques minutes suffisent pour effacer le malaise et laisser place au bien-être. Ils maîtrisent leur technique de façon irréprochable. Il est vrai que les non-voyants développent bien plus leurs autres sens. Ce sont des pros!

samedi 30 octobre 2010

Le Sichuan

 
Excusez notre silence virtuel: on a eu des journées hyper remplies dernièrement! Cette entrée de blog portera donc sur nos deux semaines dans la province du Sichuan, soit: Chengdu - Leshan - Emei Shan - Chengdu - Songpan - Chengdu.  La ville de Leshan possède un attrait très couru des backpackers: un public security bureau qui émet des extensions de visa en 24h, la moyenne étant de 5 à 7 jours dans les autres villes. Autrement, il y a aussi un gros Bouddha géant qui se visite bien, en attendant son visa. Nous disposons donc de trente jours supplémentaires pour partir à la découverte du Sichuan et du Yunnan. Yé!

Avant de rentrer à Chengdu, un petit croche par Emei Shan, une des cinq montagnes sacrées en Chine et ancien lieu de pèlerinage. D'ailleurs, grâce à un phénomène de réfraction particulier, à certains moments on peut apercevoir un halo autour du pic. On raconte que plusieurs pèlerins plongèrent dans le vide, après avoir vu ce qu'ils croyaient être “l'auréole du Bouddha”. C'est ainsi qu'on s'y est fait toute une randonnée, attirés davantage par les paysages à couper le souffle que par ferveur religieuse, vous l'aurez deviné. Emei Shan en deux jours, ça implique plus de 20km dans la première journée, avec 1500m de dénivelé à grimper, une nuit dans un monastère perdu au beau milieu de la montagne, pour finir en beauté avec une dizaine de km le lendemain et un dénivelé de 500m. Ça été particulièrement intense, mais l'éclat du paysage nous le rendait bien.

De retour à Chengdu, après avoir visité la base de reproduction des pandas, craqué sous le charme de ces adorables nounours (et pris un peu trop de photos de pandas, vous nous en excuserez), on a mis le cap vers le nord du Sichuan, en direction de Songpan pour y faire un trek à cheval. La route n'a pas été facile! En chemin, on a dû s'arrêter pendant 7 heures à une station-service... parce qu'ils étaient en train de refaire la route! On peut donc dire qu'on a parcouru un peu plus de 300 km en 15 heures: on bat nos records indiens de lenteur. Heureusement qu'on a rencontré Virva, un Finlandaise avec qui on a jasé un peu, histoire de passer le temps. On a même joué avec des enfants qui étaient, eux aussi, prisonniers dans ce barrage routier. Finalement, ça a passé assez rapidement et comme on s'entendait bien avec Virva, on a décidé de partir en trek à cheval avec elle dès le lendemain.

Ce qui s'annonçait comme trois jours inoubliables l'a effectivement été, mais pas seulement pour les bonnes raisons. Au début, on était sous le charme du spectaculaire paysage, encadré de troupeaux de yaks sauvages et de bébés aux joues rondes bien emmitouflés... Malheureusement, les choses se sont mises à mal tourner. C'est fou comment nos états d'esprits ont passé de hyper contents à hyper déçus en quelques heures, au fur et à mesure qu'on découvrait ce qui nous attendait vraiment. En partant le premier matin, un des guides insistait pour prendre mon sac-à-dos et aller l'installer sur un cheval pour moi. Je me suis aperçu peu après que mon sac avait été ouvert et qu'il me manquait une liasse de billets de 10 yuans. C'est frustrant, mais j'ai choisi d'éviter la confrontation car nous devions passer les trois prochains jours avec ces deux guides. On apprend par la suite qu'on ne fera pas de camping finalement, et qu'on couchera plutôt dans un village tibétain. Ça nous étonne un peu de voir que les règles du jeu changent comme ça sans qu'on soit consultés au préalable, sans compter qu'on était fébrile à l'idée de camper. On a passé la nuit à grelotter, couchés par terre sur un plancher de bois, juste à côté des guides. Pas mal moins romantique que du camping d'hiver... Le lendemain matin, je me suis levée avant les autres pour lire un peu. Un des guides en a profité pour essayer de me faire des avances... Je pense qu'il ne s'est jamais fait remettre à sa place aussi sèchement de toute sa vie. Vous vous doutez que l'ambiance du groupe était alors loin d'être chaleureuse...

De plus, alors qu'on nous avait promis trois repas par jour, on n'en obtient que deux. Heureusement, on avait prévu des collations, mais manger une poignée d'arachides pour dîner quand tu fais une journée de 6-7 heures de plein-air, ce n'est pas assez. Bref, on a trouvé ça très décevant. Il est vrai que les paysages autour étaient magnifiques, mais fallait-il vraiment endurer le froid, la faim et les hostilités de nos deux guides pour avoir la chance de voir cet endroit? Attendez, ça ne fait que commencer.

Lors de la deuxième journée, en fin d'après-midi, les guides décident de marcher et laissent leurs chevaux libres, à l'avant du groupe. Alors qu'on longeait un petit cours d'eau, l'un d'eux s'éclabousse et part à la course. Le cheval de Virva a bondi de surprise, l'éjectant brusquement sur le sol. On a vu avec horreur le corps de notre amie aller se fracasser sur d'immenses roches au bord du ruisseau.

Gravement blessée, elle parvient à peine à marcher et on regagne péniblement le village tibétain. Les guides font comme si de rien était et ne prennent aucune initiative. Quand on demande à l'un d'eux d'appeler un véhicule pour la ramener à Songpan, soudainement, il ne comprend plus l'anglais. On doit littéralement aller prendre son téléphone dans sa poche de manteau et appeler le responsable du trek. Celui-ci semble comprendre la situation, mais demande à parler au guide pour qu'il lui donne notre localisation. Ce dernier choisit plutôt de couper la ligne, prétextant que l'appel lui coûte trop cher! On vous rappelle que pendant ce temps, Virva souffre à côté de nous et à du mal à respirer. Elle apprendra par la suite qu'elle avait deux côtes cassées. Le guide tente obstinément de la convaincre de coucher au village et rentrer le lendemain à cheval tel que prévu. Avec un quotient intellectuel à mi-chemin en celui d'un chien et d'un enfant, il n'a aucune empathie pour elle et ne saisit manifestement pas l'urgence de la situation. On ne s'est jamais senti aussi démunis, faire face à une telle situation d'urgence et être coupés de toute communication, au milieu de nulle part.

On a malheureusement dû avoir recours à l'ultime langage universel et serrer les poings pour se faire entendre. Comme par magie, trois heures plus tard, un véhicule arrivait au village pour nous ramener à Songpan. Non seulement ces opportunistes ne nous ont pas remboursé la troisième journée de trek non consommée, mais ils nous ont réclamé 300 yuans pour le transport, qu'on a évidemment refusé de payer, non pas sans engueulades ni menaces.

On a passé la nuit à Songpan et on s'est levés aux petites heures du matin pour être certains d'avoir des places sur un bus qui rentre à Chengdu, mais en vain. Toutes les places étaient déjà prises! Suite à la suggestion d'une Chinoise qui a compris notre problème, on a pris un bus vers Pingwu, encore plus au nord, en espérant que de là, on pourrait prendre un bus pour Chengdu. La chance a finalement tournée, et malgré un immense détour, on est arrivés à Chendgu 13 heures plus tard. Heureusement, dès le lendemain, Virva a pu recevoir les soins médicaux dont elle avait besoin et ne souffrira pas de complications suite à ses fractures.

C'est clair qu'en acceptant de faire de l'équitation, on accepte aussi les risques qui vont avec. Par contre, on s'attend à recevoir de l'aide quand une situation d'urgence se présente. Ces guides n'avaient ni la débrouillardise ni les qualifications requises pour faire ce qu'ils font. C'est un des éternels questionnement auxquels on fait face en Asie: la destination vaut-elle tout le mal qu'on doit se donner pour y arriver? Les paysages de Songpan sont-ils assez beaux pour qu'on s'impose plus de 24 heures d'autobus pour l’aller-retour, et qu'on accepte de souffrir de la faim, de la soif et du froid pendant trois jours avec des guides incapables de réagir aux urgences pour les admirer?

On a pris quelques jours plus tranquilles à Chengdu, histoire de digérer cette expérience. On recharge nos batteries et on se dirige vers Lijiang, dans la province du Yunnan.

mardi 12 octobre 2010

Yangshuo


Après trois semaines de métro, de foule et de marches interminables à travers trois des plus grandes villes du pays, on s'éloigne enfin de la côte pour s'enfoncer dans la portion continentale. Donc, dans la Chine rurale, voir ancestrale, au rythme plus lent, là où la modernité n'a pas avalé tout le territoire agricole pour y planter ses gratte-ciel? Non, pas tout à fait. L'opération rase-motte fait des ravages un peu partout, même dans les coins qu'on aurait qualifiés de reculés il n'y a pas si longtemps.

Attention, ce n'est pas nécessairement négatif. Le développement à grande échelle de l'Empire du Milieu aura par exemple facilité l'accès aux ressources et aux technologies, aisant communications et transport aux quatre coins du pays. Il aura également revitalisé de nombreux sites et attractions touristiques et du même coup, les villes et villages des environs. Il s'en trouve toujours pour dire que tout cet avancement s'est fait sans tenir compte d'un paquet de facteurs sociaux et environnementaux... J'imagine que l'administration publique y est allée selon l'adage: "Il faut souffrir pour être beau". On pourra mieux en juger dans les prochaines semaines.

La municipalité de Yangshuo est un des "sites" les plus visités de Chine. Qui dit tourisme dit consommation... On y a même trouvé, avec un soulagement quasi hystérique, du beurre d'arachide, une denrée rare que nous n'avions pas revue depuis l'Inde. Décidément, notre séjour ici commence bien!

En plus d'avoir le charme des montagnes, l'endroit regorge de choses à faire et à voir. L'attraction principale de l'endroit est impossible à manquer, la ville est construite en plein dedans. En fait, il ne s'agit pas seulement de la ville mais bien de la toute la région dont le paysage, unique en son genre, est meublé d’impressionnantes formations karstiques. L'attrait de Yangshuo, c'est de pouvoir les admirer tout en profitant de balades sur les rivières Li et Yulong, à bord d'un radeau en bambou. Ensuite, viendront la randonnée en montagne, la marche et le vélo (en tandem pour les couples) pour contempler ces intrigants rochers.

Avec toutes ces possibilités, surtout que la majorité des activités sont payantes, pas surprenant que plusieurs opportunistes usent de beaucoup d'imagination pour avoir leur part du gâteau. Et comme on essaie d'éviter de passer par les agences ou groupes organisés, on découvre rapidement les subtilités d'un système propre à cette ville. La commercialisation des attraits touristiques à Yangshuo est bien particulière.

Par exemple, pour la balade en radeau sur la rivière Li, on doit impérativement passer par un rabatteur qui amènera ensuite le touriste vers l'embarcation. Pour une raison que l'on ignore, son conducteur ne négocie pas directement avec le client. On s'entend ici qu'on paie drôlement plus cher pour rien ou plus justement pour un intermédiaire qui ne sert à rien. Non, ce dernier ne parle pas plus anglais que les autres. Par contre, on a eu droit à une scène amusante quand plusieurs de ceux-ci se sont mis à s'engueuler entre-eux pour déterminer de qui "nous avait vus en premier".

Autre exemple, il existe une ou plusieurs grottes inondées à visiter dans les environs mais personne ne sait combien ni comment s'y rendre et cela semble voulu ainsi. On remarque d'ailleurs de l'information biffée sur certains panneaux de circulation... La seule façon d'aller visiter est d'acheter son billet dans un des kiosques, répandus un peu partout en ville, qui promettent d'amener leurs clients à la seule "vrai" grotte. Leurs affiches annoncent: "Beware of the fake", "The only real Water Cave" et autres slogans du genre où chacun se targue d'avoir la meilleure offre. Le prix d'entrée étant assez élevé, c'est un pensez-y bien avant de dépenser une petite fortune pour une activité qui pourrait être autant son coup-de-cœur qu'une profonde déception. De notre côté, nous avons eu la chance de tomber sur une bonne affaire et nous avons adoré notre expérience. En plus d'une bonne marche à l'intérieur de la grotte, nous avons eu droit à un trio de baignade soit dans l'eau claire (et froide), dans la boue et finalement dans une source thermique. Extraordinaire.

Ce qui est bien avec la Chine, c'est qu'il y a des attraits touristiques partout. La première journée où l'on a loué des vélos, on s'est complètement perdus en cherchant un certain moon hill, mais on est quand même tombés sur le pont du Dragon de Jade. Une attraction plutôt méconnue des touristes... Que plusieurs confondent avec un autre célèbre pont, celui de la rivière Long. Ce dernier, personne n'en connaît le nom véritable car les habitants du village l'appellent également le pont du Dragon de Jade pour attirer les touristes et leur proposer des balades sur la rivière. Le plus drôle est que le mot "Long" en mandarin signifie dragon... Pas étonnant que les touristes soient aussi confus!

Jusqu'à présent, parcourir de longues distances en Chine n'était pas trop éprouvant: il existe des trains rapides sur les liaisons entre les grandes métropoles, permettant de parcourir 1500km en une dizaine d'heure. Ce n'est pas la même chose quand on parle de villes plus modestes comme Chengdu, seulement une dizaine de millions d'habitants! Alors qu'on se préparait déjà mentalement aux 24h de train qui nous séparent d'elle, on est tombés sur des billets à 70% de rabais... Pour 10$ de plus que le train, nous atteindrons donc la principale ville du Sichuan par voie aérienne, en 1h30!

jeudi 7 octobre 2010

Shanghai



Si Beijing est une ville moderne, alors Shanghai est carrément futuriste. La mégapole s'est développée à toute vitesse: plus de 3000 tours et gratte-ciel se sont construits en moins de 10 ans. Elle est donc plus froide et ne dispose pas du charme historique de son aînée. Shanghai se contente d'être la petite soeur snob et rebelle, avec ses innombrables magasins de luxe et ses quatre Starbucks par quartier. Une ville à côté de laquelle on ne voulait pas passer, mais où l'on ne se sent pas tout à fait à notre place en chaussures de randonnée et en t-shirt de microfibre. Deux aventuriers dans la ville!

Petite anecdote: on a manqué notre train pour Shanghai, on attendait à la mauvaise gare.  On s'est rendu compte de notre erreur environ 20 minutes avant le départ: s'en suivit une course folle dans le métro de Beijing, mais en vain. On a dû opter pour la liaison suivante: un train de nuit. On a réussi à faire échanger nos billets facilement, sans pour autant comprendre qu'il ne restait pas de couchettes ni de places assises. On a eu la surprise en entrant dans le train, quand une préposée a regardé nos billets et nous a invités à se prendre un morceau de papier journal et à aller s'asseoir par terre à l'avant du wagon...

L’Exposition Universelle de Shanghai est vraiment faite à l'attention des Chinois: peu d'explications en anglais, des présentations strictement en mandarin... Bref, on en a eu amplement d'une seule journée. Les files d'attente étaient ahurissantes! Par exemple, pour entrer au pavillon du Japon, il nous aurait fallu attendre 5 heures. On passe au plan B, le Kazakhstan! Sans blague, on a vraiment aimé ce pavillon là. Ça donne presque le goût d'y aller... Évidemment, on n'a pas réussi à visiter tous les pavillons et on s'est contenté d'en admirer l'extérieur dans la plupart des cas. Un véritable concours d'architecture! Comme si tous les pays s'était donné comme mandat d'avoir le pavillon le plus original. Il y a comme un malaise dans certains cas quand on pense à l'argent dépensé dans ces pavillons... La Lettonie a volé la vedette avec son spectacle de skydiving: un projet qui a coûté six millions de dollars, une somme toute sobre comparée aux dépenses des autres pays.  Pour sa part, le Canada, avec un gargantuesque budget de 58 millions, a réussi à construire un gros truc en bois et y vendre de la poutine en y faisant jouer de la musique pop. Bravo!

Autrement, on a eu droit à l'ultime bain de foule chinois en allatn se promener sur la Nanjing donglu en pleine fête nationale, soit le 1er octobre. Outre le traditionnel salut au drapeau télévisé sur la place Tian'anmen et la quantité incroyable de gens déferlant sur les rues, on ne sent pas tant que ça l'ambiance festive.  Tout comme on ne sent pas du tout le communisme jusqu'à maintenant... Outre la censure internet, bien sûr.  Les couches socio-économiques sont aussi bien définies qu'ailleurs et en voyant le rythme auquel les tours à condos se développent, personne ne remettrait en question ici l'existence de la propriété privée. L'écart entre les pauvres et les riches est parfois saisissant: des gens vident les poubelles devant les magasins huppés dans le quartier chic de Xintiandi. On est bien loin du modèle de Marx!

Pour avoir une meilleur idée du communisme en Chine, il faut chercher plus loin.  On découvre alors que bien que les Chinois aient le droit de posséder maison ou commerce, c'est le gouvernement qui approuve tous les prêts bancaires.  De plus, on peut être propriétaire d'une bâtisse mais jamais du terrain qu'il y a en dessous: chacun des 9,6 millions de kilomètres carrés du pays appartient au Parti Communiste Chinois. Finalement, les sites internet de réseautage ou d'information tels que Facebook, Twitter, Youtube et Wikipédia sont inaccessibles, alors que tous les médias chinois appartiennent également au parti et véhiculent une image positive de ce dernier. Un peu partout, on voit des soldats en uniforme qui font des rondes en marchant d'un pas parfaitement synchronisé, histoire de faire respecter l'ordre public. Sur une note plus légère, cela ne nous a pas empêché de partager quelques Tsingtao dans un parc avec deux Québécois rencontrés à l'Expo...

Sérieusement, même si je me moque de son pavillon à l'Expo, il faut que je le dise haut et fort: "Vive le Canada!". Voyager, ça fait réaliser à quel point on est chanceux d'être nés là-bas. On le prend parfois pour acquis... Par exemple, on jasait avec des Israéliens rencontré à l'auberge de jeunesse de Beijing.  On leur disait à quel point on avait aimé notre expérience au Bangladesh.  Ils nous ont répondu qu'ils aimeraient bien y aller un jour, mais que comme ils sont nés en Israël, l'accès à ce pays leur est interdit, ainsi qu'à d'autres pays musulmans comme le Pakistan et la Malaisie. Similairement, les Américains doivent payer leur visa le double du prix dans plusieurs pays. Heureusement pour nous, tous le monde semble aimer les Canadiens!

jeudi 30 septembre 2010

Beijing


Nous voici donc dans l'Empire du Milieu, le pays de Mao, du thé vert, de la soie, du jade et du "Made in China". Le pays où les gens semblent parler du nez et écrivent avec des signes incompréhensibles. C'est également le pays le plus populeux du monde, celui du plus grand parti politique, communiste de surcroît avec 78 millions de membres sur une population de 1,324 milliards. Voit-on enfin une réussite de ce modèle tant contesté, avec raison, tant il a échoué? On a de quoi être impressionnés.

D'une part, la Chine est admirée. Avec son taux de croissance élevé et soutenu par une classe moyenne de plus en plus grande et avec ce qui deviendra bientôt le premier marché de consommateurs de la planète, les investisseurs du monde entier voient des signes de $ dans les yeux des Chinois. L'époque où la Chine n'était que l'usine "cheap-labor" du monde occidental est révolue. C'est que la Chine a bien joué son jeu: ce sont les Chinois eux-même qui profiteront de la manne. Maintenant qu'ils ont les ressources humaines et matérielles pour produire ainsi que les consommateurs pour acheter, ils n'ont plus besoin de personne.

D' autre part, la Chine est critiquée. Non-respect des droits de l'homme, manipulation de l'information, censure, expropriation et génocide. Certains appellent au boycott de ses produits ou de ses jeux olympiques par exemple. D'autres incitent même à ne pas y voyager, à ne pas aller y dépenser son argent, histoire de protester contre le régime... Nous en sommes arrivés à la conclusion que, pour en avoir une meilleur idée, il fallait s'y rendre pour le voir de l'intérieur. Et puis il faut aussi garder en tête que la politique et le peuple ne font rarement qu'un et que l'un n'est pas représentatif de l'autre. C'est donc ce que nous nous proposons de découvrir dans les prochaines semaines.

Bien que le dernier mois fut plutôt tranquille pour nous (nos attentes étaient élevées pour la partie du sud de l'Inde), les deux dernières semaines nous auront au moins permis de recharger nos batteries avant d'attaquer ce qu'on pourrait appeler, encore une fois, une autre planète. Retour à la case départ: nous avons perdu tous nos repères. Tout ce qu'on avait appris de la langue, des coutumes, des habitudes des habitants, des gens qui nous entouraient ne nous sert plus. Et pourtant, ce qui en aurait découragé certains nous aura fait l'effet d'une canette de Red Bull par intraveineuse. Stimulant, revigorant. La seule pensée de venir découvrir un nouveau pays nous aura ouvert l'appétit comme à la vue d'un bon plat fumant qui sort du four. Alors que dix jours nous paraissaient interminables il n'y a pas si longtemps, nous avons vu passer la même dizaine à la vitesse d'un TGV lors de notre séjour à Pékin.

D'abord un retour sur notre escale à l'aéroport de Kuala Lumpur où nous avons passé la nuit. Pas à l'hôtel de l'aéroport. Au terminal. Dans l'aire d'attente. Non, cette situation insolite n'était pas due à un vol reporté ou à une mauvaise planification, la décision s'est prise d'avance en parfaite lucidité, histoire de sauver le coût d'une nuit à l'hôtel dans une ville où tout est horriblement cher, dumoins en comparant avec l'Inde. Saviez-vous qu'il existe toute une communauté internet qui répertorie les aéroports où il fait bon dormir? Si vous êtes curieux, allez faire un tour ici. Les coins sombres et tranquilles ne sont pas si nombreux au terminal principal et nous avons même été déplacés vers une heure du matin parce que la section où nous étions devait être fermée pour la nuit. Par contre, mention honorable pour les bancs à quatre place sans appuis-bras où il est confortable de s'allonger et pour les toilettes où nous avons pu prendre une douche improvisée en toute quiétude.

Quelques heures plus tard, les roues de notre avion touchaient le sol. À travers le hublot, c'est une pluie fine que nous voyions tomber sur Tianjin. Il nous restait encore deux heures de bus avant de rejoindre la capitale. Une fois rendus, par contre, la tristesse de mère nature s'est évaporée pour faire place à l'enthousiasme de vos deux voyageurs préférés, excités comme des enfants arrivant à Disney Land. Les premières constatations prennent surtout la forme de comparaison avec l'Inde. La différence est frappante.  La société chinoise doit bien être en avance d'un demi-siècle par rapport au pays de Ghandi. Sur tous les aspects, la Chine est à l'opposé du pays qu'on a à la fois appris à aimer et à détester dans les derniers mois. Les bâtiments modernes, les trottoirs larges, l'habillement mode des gens, la propreté, l'ordre, l'impression d'une société organisée au quart de tour. Les jours qui ont suivi nous auront permis de le confirmer. Grattes-ciel, voitures récentes, vêtements griffés, Pékin nous montre une Chine bien de son temps à l'avant-garde du progrès sous toutes ses formes. Est-ce que cela veut dire qu'elle renie son passé? Au contraire. Elle en est fière et le met en valeur. Chaque monument, musée, parc ou mur(!) est présenté de belle façon et entretenu à la perfection. L'harmonie entre le traditionnel et le moderne est enveloppante.

Pour en profiter, il faudra se forcer. Car la communication ne se fait pas en anglais ici, même si on la qualifie souvent de langue internationale. Très peu de Chinois le parlent, ne serait-ce que quelques mots. Même les plus jeunes. La Chine n'en a jamais eu besoin pour se hisser au deuxième rang des économies mondiales et ce n'est pas aujourd'hui que ce sera nécessaire. En fait, à l'inverse, apprendre le mandarin ne serait pas une si mauvaise idée pour nous, occidentaux, et je ne serais pas surpris que son enseignement soit de plus en plus répandu. De toute façon, pour le voyage, c'est essentiel si l'on veut réellement apprécier. Sans mandarin, j'ai bien peur qu'on ne fasse que voir la Chine mais pour la vivre, il faut pouvoir baragouiner quelques mots. Le séjour ne sera que plus enrichissant. En prime, le sourire qui illumine le visage de son interlocuteur quand on le salue dans sa langue maternelle vaut amplement l'effort à y mettre. Le plus étonnant, c'est que ce n'est pas si compliqué que ça; on ne se débrouille pas mal du tout et on est vraiment contents d'avoir pris la peine de faire quelques leçons avant le départ. On a appris davantage de mandarin en trois jours que d'hindi en trois mois.

On a également appris, voire confirmé, que la Chine, c'est cher. Pour nous, ce sera donc bouffe de rue et dortoirs.Rien de bien désagréable, ça donne souvent lieu à des rencontres amusantes. Outre le choc de la langue et du coût de la vie, il y a celui de la censure. On savait que Facebook serait bloqué, ça on peut farie sans, mais figurez-vous que votre blog préféré ainsi que Picasa (le site utilisé pour nos photos) n'étaient pas accessibles non-plus, en tant que produits "Google". C'est donc en déjouant la censure chinoise que nous vous envoyons cette entrée de blog!

Vous vous doutez sans doute déjà qu'on a aimé notre séjour à Pékin, n'est-ce pas? Juste. Très Juste. Le point le plus évocateur c'est qu'au lieu de rester 6 jours comme prévu, nous avons passé 9 jours dans la capitale chinoise. La ville, immense, regorge de choses à faire et à voir et nous n'aurions pas pu passer à côté de quoi que ce soit offert ici. Comme quoi? En rafale, nous avons visité la place Tian'anmen, la Cité Interdite, Dashanzi 798 (le quartier des arts), le mausolée de Mao, le parc olympique, la fameuse grande muraille, le Temple du Ciel et j'en passe. D'ailleurs, les chinois ont beaucoup d'imagination lorsque vient le temps de donner des noms à leurs monuments. Je vous en partage quelques uns: le Palais de l'Harmonie Suprême, le Palais de la Pureté Céleste, le Pavillon de la Tranquillité Impériale, la Porte de la Vérité Pure, le Temple de la Grande Charité et la Salle de la Protection Éternelle. Curieux... En terminant, il ne serait pas juste de conclure ce texte sans vous parler un peu des Pékinois que nous avons trouvés hyper gentils. L'esprit communautaire semble occuper une place importante dans leur vie. On les voit souvent en groupe en train de partager un repas ou une partie de cartes, que se soit dans les hutong (quartiers typiques à maisons basses) ou même sur les sites touristiques. Les personnes âgées sont actives, ça joue au mah-jong et même au aki-sac! On les voit aussi dans les parcs, le soir, pratiquer la danse, le tai-chi ou le kung-fu. Ce sont de bons vivants et ils n'hésitent pas à se bourrer la fraise en famille ou entre amis. Inspirant!

mercredi 15 septembre 2010

Varkala et Kovalam



On a passé notre dernière semaine en Inde à Varkala puis à Kovalam, deux villes au bord de la mer d'Oman. Varkala est située sur une falaise, ce qui lui donne une charme tout particulier, et des vues à couper le souffle. En saison, elle est prise d'assaut par les touristes occidentaux. Kovalam est toute aussi populaire, mais avec davantage de tourisme intérieur et donc d'Indiens bedonnants en speedo. Ici, il n'y a pas de complexes!

Cette semaine plus tranquille donc aura été l'occasion pour nous de faire une petite rétrospective sur la première partie de notre périple. Que dire après plus de trois mois passés sur le sous-continent indien? On ne peut faire autrement que de conclure que l'expérience a été positive, somme toute. On a pris le temps de se remémorer nos coups de coeur: Leh, sans hésiter, mais aussi le Punjab, le Rajasthan, le Bangladesh et Mamallapuram. Notre parcours a également été parsemé de moments forts: on se rappelle la descente de Khardung La en vélo, la nuit sur une dune de sable dans le désert, notre randonnée boueuse dans les Sundarbans, notre escapade en moto autour de Mamallapuram, le body-surfing à Kovalam et j'en passe. On se remémore également nos débuts, à Delhi... Il nous semble que ça fait une éternité ! On en a fait du chemin depuis, et on a acquis une certaine aisance. Parce qu'au début, l'Inde te rentre dedans et te déstabilise. Elle te confronte à tes valeurs, te pousse à l'extrême. Inde, tu n'auras pas eu raison de nous! L'Inde et son intensité nous auront légué un précieux héritage: des souvenirs intarissables, et plus d'anectodes qu'on a de temps pour les raconter. Certes, si nous avions à recommencer, nos choix seraient différents quand à l'itinéraire et au temps passé dans chaque ville. Mais il fallait le vivre une première fois pour savoir, non?

Pour nous, c'est une partie du voyage qui se termine. Il y a eu des journées plus difficiles où on rêvait au moment où on quitterait ce pays, et on se disait que ce serait avec soulagement qu'on quitterait enfin le sol indien! Ce n'est plus le cas aujourd'hui. On a eu une relation amour-haine avec l'Inde, et se sent nostalgique à l'idée de la quitter. Y retourner un jour? Peut-être, mais il y a tellement de pays à voir dans le monde qu'il est peu probable qu'on y retourne une seconde fois dans une optique de voyage. On vous le recommande par contre! On en apprend tellement sur soi.

C'est donc le coeur serein qu'on prend le chemin de l'aéroport de Trivandrum. Une escale à Kuala Lumpur et 36h plus tard, on devrait arriver à Beijing!

Les backwaters


Le 7 septembre, il y a eu une grève générale de décrétée dans tout l'état du Kerala. Le train n'étant pas affecté, on l'a pris de Kochi à Alleppey. Comme on a quitté tôt le matin, on ne se surprenait pas de ne pas voir trop d'activité. La surprise, on l'a eue arrivés à Alleppey, en voyant que les rues étaient désertes... Une vraie ville fantôme! Le contraste est fort comparé à l'animation habituelle des villes indiennes. C'était presque épeurant. Tous les commerces étaient fermés, il n'y avait personne sur les rues, pas de circulation, pas d'autobus, pas même de rickshaws! Ça sentait l'alerte à la bombe nucléaire plutôt que la grève. D'ailleurs, personne n'a réussi à nous expliquer pourquoi ils étaient en grève, et on a même entendu des commentaires du genre "nous, les kéralais, on est paresseux, on prend n'importe quelle occasion pour ne pas travailler". Tu parles d'un peuple fier! Après vérifications sur le web, il s'agit d'une grève d'envergure jusque-là inégalée pour l'Inde depuis les années 60, initiée par rien de moins que huit syndicats majeurs en Inde, pour protester contre le non-respect des normes du travail, la hausse des prix et le manque de partenariats public-privé. Hum, d'un oeil occidental ça semble un peu éparpillé... Il est évident que la majorité des Indiens ne se sent pas concernée par ces enjeux. Le plus drôle c'est qu'au lieu de faire réagir la population, de la sensibiliser à la cause, celle-ci en profite pour rester tranquille à la maison!

N'empêche qu'à un moment on se questionnait sérieusement quant à ce qu'on allait bien pouvoir trouver à manger. C'est une drôle de sensation que de retrouver ses besoins de base compromis, ça fait réaliser bien des choses. Finalement, on a trouvé un homme qui vendait des bouteilles d'eau et des chips, en cachette, de peur d'avoir des représailles à cause de son manque de solidarité. Ça nous a dépanné pour le dîner, et on a eu la chance de trouver un resto ouvert pour le souper.

Allepey fut le point de départ d'une traversée magique vers Quilon dans les backwaters, ce labyrinthe de lagunes formant des routes, des ruelles et des carrefours. Ce véritable réseau de voies aquatique grouille d'activité: on peut y voir des femmes faire leur lessive sur les rives ainsi que de nombreux pêcheurs à l'oeuvre dans de mignons petits bateaux multicolores. Fait étonnant, on s'est retrouvés seuls avec les cinq membres de l'équipage dans un bateau assez grand pour cinquante! En fait, c'est un organisme gouvernemental qui vend ces "croisières". Le bateau part donc à chaque jour, peut importe le nombre de sièges vendus. C'est pas mal moins beau que les houseboats des compagnies privées, mais pas mal moins cher aussi! Ce fut également l'occasion d'échanges rafraîchissants, les Kéralais se donnent peut-être la réputation d'être paresseux, mais ce sont des interlocuteurs intéressants et différents: le Kérala est l'état indien ayant le plus haut taux d'alphabétisation du pays, le nombre moyen d'enfant par foyer est de 1.8 et près de 90% des femmes sont scolarisées. On est loin du stéréotype indien!

Kochi

Après un paisible petit séjour en montagne, le retour dans une ville typiquement indienne, avec ses klaxons et sa folie, a eu l'effet d'une douche froide. Il faut dire que le quartier où l'on a choisi de dormir, Ernakulam, a autant de charme qu'un mal de dents. Le truc touristique, ici, c'est Fort Cochin, un petit village à l'allure un peu coloniale dont le développement a été influencé par les Portuguais et les Néerlandais. Outre l'ambiance, on y retrouve également des filets à pêche forts particuliers, un vestige de relations commerciales avec la Chine.



On a donc été voir les fameux filets à la tombée de la nuit pour profiter du coucher de soleil comme arrière-plan. On avait espoir d'observer des pêcheurs à l'oeuvre, et nos prières ont été entendues: c'est fabuleux de voir cette immense structure en bois émerger de l'eau. Toute une technique!

Certains pêcheurs ont remarqué notre intérêt et nous ont fait signe de s'approcher. On a à peine eu le temps d'anticiper un échange intéressant avant que la réalité indienne ne nous rattrappe: les conversations spontanées et gratuites n'existent pas ici. L'un d'entre eux nous explique brièvement comment il pêche, avant de partir sur son laïus: le filet ne lui appartient pas, il doit redonner 30% aux propriétaires et, ces temps-ci, la pêche n'est pas bonne, et il aimerait bien un petit don. Une femme qui était avec nous lui donne 20 roupies (l'équivalent d'un souper) mais le pêcheur lui répond qu'il aimerait bien en recevoir 500.

Les occasions d'échanger de façon satisfaisante avec un Indien sont rares, voire inexistantes. Ils ont constamment derrière la tête l'idée nous demander de l'argent, que ce soit en mendiant ou en nous vendant quelconque produit ou service bidon. C'est parfois très frustrant de ne pas pouvoir connecter avec eux. La relation avec autrui est biaisée quand une des deux parties ne reconnait pas le rapport d'égalité, et la plupart des Indiens en sont incapables, ils sont viscéralement possédés par des pensées récurrentes où ils se demandent comment ils vont pouvoir nous soutirer quelques roupies. On est loin de l'échange culturel bidirectionnel où chacun y trouve son compte en apprenant sur l'autre.

Pour en revenir à notre conversation avec les pêcheurs, pour plusieurs raisons, on a choisi de ne rien donner. Ce sont eux qui nous ont invités sur leur plateforme, on y est resté environ cinq minutes, et ça avait à peu près tout d'une discussion et rien d'une visite guidée. Je refuse de payer quelqu'un parce qu'il nous adresse la parole, c'est carrément odieux. Je comprends que nous soyons plus choyés qu'eux sur bien des plans, mais ce n'est pas une raison pour se vider les poches à chaque fois qu'on nous le demande, soit environ quinze fois par jour. Premièrement, notre budget est loin d'être illimité, et deuxièment, quand on donne, ça crée un précédent et ça encourage ce genre de comportement chez les habitants, tel un cercle vicieux.

Par exemple, à Rameswaram, les enfants de la rue nous demandaient des crayons avant même de nous dire bonjour. À cause d'un précédent, parce qu'ils se sont déjà fait offrir des crayons par d'autres voyageurs. Au Bangladesh, un pays qui a vu beaucoup moins de tourisme que l'Inde, les jeunes étaient tout excités quand ils nous voyaient arriver, et fiers de nous aborder avec les quelques mots d'anglais qu'ils connaissaient. Une fois, on a joué au soccer avec eux. C'était agréable, ça riait quand on leur a montré comment frapper le ballon avec la tête. Bref, on a eu autant de plaisir qu'eux, et il n'y a pas eu d'échange de crayon. Il faudrait que certains voyageurs arrêtent de se prendre pour des missionnaires et s'enlèvent de la tête qu'ils sauvent des villages entiers de la famine en leur apportant des stylos à bille. S'intéresser à eux leur rapporte bien plus...

Kodaikanal et Munnar


Kodaikanal et Munnar sont deux petites villes en montagne, situées à respectivement 2100m et 1600m d'altitude sur les ghâts occidentaux, cette chaîne de montagnes qui traverse l'Inde du sud. Il s'agit, grosso modo, d'une frontière naturelle entre les états du Tami Nedu et du Kérala. Ça nous a fait un bien fou de passer quelque temps en altitude, à faire de la randonnée du matin au soir et à respirer de l'air pur. Kodaikanal est charmante avec ses rues bordées de kiosques vendant du chocolat maison. En effet, c'est un des seuls endroits en Inde où celui-ci ne fond pas! La région en a fait une spécialité. C'est aussi un des seuls endroits en Inde où l'on peut observer des Indiens avoir froid, une scène toujours un peu coquace! Dès qu'il fait moins de 20oC, il sort les gros manteaux d'hiver, la tuque et le foulard. Ici, le foulard ne se porte pas autour du cou, mais bien autour de la tête, façon turban. L'Indien est mésadapté au froid. Pourtant, ceux-ci en redemandent, car Kodaikanal est une destination très prisée pour son exotisme par la classe moyenne. Plusieurs y viennent en lune de miel!

À Munnar, un peu plus bas, la ville est sans charme. Ce sont les alentours qui sont digne de mention: les montagnes sont recouvertes de plantations de thé. Ces arbustes parfaitements taillés sont particulièrement beaux à voir sous la luminosité changeante de la région. Ici, le soleil joue à la chaise musicale avec les nuages, et c'est chacun son tour: il pleut, dix minutes plus tard il fait soleil, et on passe notre temps à enlever et remettre nos imperméables. Ici encore, comme à Kodaikanal, nos journées de randonnée sont mémorables.


Autrement, comme Fred le mentionnait précédemment, on prend un malin plaisir à appliquer notre nouvelle politique du "zéro-rickshaw". En effet, après avoir été maintes fois exaspérés par leur attitude discutable et leur forte tendance à multiplier les tarifs par douze quand ils voient approcher des gens à la peau blanche, on a décidé qu'on ferait sans eux. On se servait des ces baby-taxis surtout pour des moyennes distances, quand c'est trop loin pour marcher. C'est qu'ils sont parfois terriblement envahissants! Habituellement, à peine notre train arrive-t-il à la gare que des hordes de rickshawmen nous ont repérés et se massent près des portes en hurlent en notre direction, nous demandant où nous allons, parfois en lançant des prix avant même que nous ne leur ayons répondu. Ils s'aggripent sur nos backpacks, essayent de les prendre et de les mettre à l'arrière de leur rickshaw. On a beau leur dire non, ils insistent. On se retrouve souvent dans l'obligation de hausser le ton... Quand on leur dit qu'on préfère marcher, ils se mettent à inventer toutes sortes de raisons pour nous en dissuader, le plus souvent en exagérant les distances à parcourir. Bref, plus souvent qu'autrement, on rit avec eux plutôt que de se fâcher, et on accepte qu'ils nous suivent quelques temps... Ils finissent par se lasser, mais les plus têtus parmi eux vont jusqu'à nous suivre en rickshaw et nous faire ce qu'on a maintenant baptisé "la passe de l'Indien": nous dépasser, puis arrêter son rickshaw devant nous, histoire de nous forcer à le contourner (idéalement en passant dans une flaque de boue) en continuant à nous interpeller: " Yes?! Hello! Rickshaw! Fifty rupees!". Chère Inde.

On se sentait parfois dépendants des rickshaws, parce que les autobus locaux sont assez rebutants à priori pour quiconque ne s'exprimant pas couramment en tamoul (Quoi, vous non plus?). Faute de pouvoir lire la destination ou le nom du circuit sur le bus, on s'en remet aux numéros, mais ceux-ci ne sont pas nécessairement fiables, et plusieurs bus arborent plus d'un numéro. Finalement, en Inde, les arrêts ne sont pas marqués, il faut repérer le groupe de gens qui attendent sur le bord de la rue. Pour ajouter un peu de piquant, les autobus ici ne s'arrêtent pas, ils ralentissent seulement. Il faut donc sauter à bord, chose plutôt délicate quand le bus est bondé, qu'il y a déjà des gens sur le toit et qui dépassent par la porte et les fenêtres, et qu'en même temps on veut valider la destination du bus avant d'y sauter.

Malgré tout, à force d'essayer, on s'est rendu compte que ce n'est pas si difficile que ça. Il suffit d'apprendre à prononcer le nom de l'endroit où l'on veut aller en utilisant un accent indien. Souvent, ça se résume à rouler les "r" et aligner les syllabes rapidement, sans vraiment placer d'accent tonique. D'ailleurs, Fred est rendu un expert dans ce domaine! Somme toute, on finit toujours par arriver à destination, (non sans quelques détours). De toute façon, on n'est jamais vraiment pressés! D'autant plus que les chauffeurs et les contrôleurs font tout pour nous aider et nous comprendre; parfois, c'est tout le bus qui s'y met! On vit de beaux moments, contrairement à lorsqu'on prend des rickshaws. Et pour moins cher!

Rameswaram


Déjà, sur une carte, Rameswaram promet d'être un endroit unique. Installée sur une protrusion du continent indien, la ville est à quelques kilomètres de ce qu'on pourrait croire comme étant le bout du monde. Parce qu'elle est sur une île, qu'on s'y rende en voiture, en bus ou en train, le chemin est le même. Tout droit. En fonçant vers l'horizon bleu azur, on voit la mer d'un côté, puis de l'autre et bientôt, les deux côtés se rejoingnent par en dessous. C'est comme si, propulsés à vive allure, on avait raté le dernier arrêt sur la terre ferme et qu'on se dirigeait tout droit vers le Sri Lanka en flottant sur l'eau. Le Pamban Bridge est la seule chose qui nous sépare du fond.

Lentement, le train s'approche de l'autre rive comme une âme arriverait au paradis. De loin, on dénote les cocotiers, le sable blanc, quelques bateaux de pêcheurs ajoutant de jolies couleurs au paysage et bien sûr, la mer. Une fois sur place, pas de surprise. C'est tranquille. On est accueillis chaleureusement par le sourire des villageois. L'un d'eux nous invite à prendre le thé qu'on accepte volontiers.

À mesure que l'on approche du temple, on sent que l'activité s'intensifie. Le soleil est de plomb et on porte chacun un bon 15 kilos sur le dos. La marche est dure mais le rythme est bon. Une seule question, où est-ce qu'on pose nos valises? De ville en ville, à chaque nouveau déplacement, le dilemne est le même. Est-ce qu'on s'arrête au premier hôtel qui satisfait nos critères? Est-ce qu'on essaie de trouver celui recommandé par notre Guide du Routard, perdu au fond d'un labyrinthe de ruelles obscures? On opte pour la deuxième option. Cette fois-ci par contre, l'hôtel est facile à trouver, juste à côté du temple. Génial, il est complet. On revient sur nos pas et on en visite une demi-douzaine. Ils sont tous complets. Super. Ici encore, on en soupçonne quelques-uns d'accueillir seulement les Indiens, mais qu'est-ce qu'on peut y faire? C'est peut-être une faveur qu'ils nous font... On finit par trouver une chambre, pas trop loin du centre.

La difficulté à trouver une chambre, nous dit-on, s'explique par la tenue d'une célébrationdont j'ai oublié le nom. En effet, Rameswaram accueille plusieurs évènements par mois et rares sont les semaines où il ne s'y passe rien. En poussant les recherches un peu plus loin, on apprend que la ville est en fait le deuxième centre de pélerinage le plus fréquenté par les Hindous après Varanasi. En plus de venir se recueillir dans un gigantesque temple, plusieurs vont se baigner dans les eaux environnantes car elles sont considérées comme sacrées. Comme à Bénarès, on y trouve un ghât, escalier menant à l'eau pour faciliter les ablutions. Certains vont même jusqu'à transporter de l'eau prélevée directement du Gange jusqu'ici, dans un rituel censé leur attirer la grâce des dieux. Évidemment, avec autant d'affluence et de rituels de toutes sortes, la rive ne s'en sort pas indemne. Déchets, vêtements, sandales et autres détritus douteux s'entassent sur le bord de l'eau. Ce n'est pas très chic mais on commence à s'y habituer. J'ai l'impression d'être en Inde depuis un an maintenant.

Autre phénomène auquel on a l'habitude, les coupures de courant. Leur fréquence est très variable d'une ville à l'autre mais aucune n'est épargnée plus de 24h. Chacune amène son lot de désagrément. Le soir, évidemment, pendant la douche (au seau de surcroit), tout savonné, la salle de bain est soudainement plongée dans l'obscurité. Au resto, ne pas voir ce qu'il y a dans notre assiette peut être assez embêtant. C'est pas parce que c'est dedans que ça se mange... En marchant dans une ruelle sombre, en écrivant une entrée pour le blog sans l'avoir sauvegardée, en regardant un film (dans une des seules chambres avec télé qu'on ait le luxe de s'offrir), 20 minutes avant la fin. Les exemples pullulent. Merci à ceux qui nous ont offert des Maglites et des lampes frontales pour Noël. On s'en sert.

Les pannes de courants sont donc attribuables à des infrastructures déficientes (vous devriez voir les poteaux électriques ici). On pourrait ajouter un autre problème causé par ce même fléau soit l'évacuation de l'eau. On en a été témoins plusieurs fois, même la plus timide des averses peut inonder les rues en quelques minutes. N'ayant aucun système de drainage digne de ce nom, les rues deviendront bientôt des ruisseaux qui se mélangeront avec, vous avez deviné, les eaux d'égouts. Plus tard, une fois l'averse terminée, le tout formera de multiples flaques d'eau stagnante dans lesquelles les chiens errants iront s'abreuver. Ragoûtant, n'est-ce pas?

Petite anecdote sur notre visite du principal lieu de culte de Rameswaram, le Ramanathaswamy Temple. Celui-ci est particulièrement grand pour un temple planté au milieu d'un village et l'intérieur se décline en plusieurs salles et corridors dont un de près de 200 mètres de long. Il est facile de s'y perdre d'autant plus que certaines sections ne sont pas accessibles aux non-hindous. Parallèlement, plusieurs monuments indiens qu'on a visités commandaient un prix d'entré différent selon si on est indien ou étranger. Chaque fois, comme un mon'oncle jamais tanné de faire la même joke, on disait au guichetier : "Yes, yes, we're Indian. We don't look Indian to you?". Inspirée par cette petite farce plate, Joëlle a réussi à l'impensable. Nous sommes certainement les seuls blancs tanants à avoir eu droit de passage dans les salles réservées aux hindous. Devant le fait, alors que je me résignais à revenir sur nos pas, Joëlle dit tout bonnement au garde: "On est ici pour en apprendre plus sur la religion hindoue dans le but de s'y convertir.". J'en croyais pas mes oreilles. Surtout que j'anticipais un éclat de rire et un signe de la main d'aller voir ailleurs mais non! Il nous fait signe d'attendre, part en courant et revient avec de la poudre blanche dans la main. Avec le pouce, il nous en écrase sur le front et nous fait signe d'avancer. Wow, j'me suis jamais senti aussi scruté du regard depuis qu'on est ici, même après 3 mois. Les gens devaient vraiment se demander ce qu'on foutait là. Après 3-4 minutes, nous aussi. Comme il n'y avait rien de si particulier, à part des Indiens qui faisaient la file pour offrir des fleurs à Shiva, on est partis comme on est venus. En essayant de se faire discrets.

Finalement, je manque de mots, de temps et/ou d'inspiration pour vous parler de notre escapade au bout du monde, à l'extrémité de l'île. Tout ce que je peux vous dire c'est que non seulement l'endroit est fabuleux mais il y règnait aussi une ambiance particulière lors de notre passage. Un peu comme si l'on approchait du fameux précipice que l'on s'imaginait, dans l'ancien temps, quand l'Homme croyait que la terre était plate. Je vous laisse regarder les photos de cette entrée dont les quatres dernières ont été prises sur la plage de Dhanushkodi, village du bout du monde. Sur l'une d'elle, on voit très bien les fameuses huttes en feuilles de palmier, typiques de l'Inde du sud.

mercredi 1 septembre 2010

Thanjavur et Madurai



Notre aventure au Tamil Nadu se poursuit à Thanjavur, une ville tout sauf touristique, qui s'appelait autrefois Tanjore. L'endroit est dominé par le temple de Brihadishvara, un gand temple vivant Chola inscrit au Patrimoine mondial de l'Unesco. Datant du Xe siècle, on le dit "vivant" parce qu'à l'époque, des centaines de personnes le peuplaient, histoire d'amuser les princes et les dieux. L'endroit se démarque donc par sa grandeur; le temple lui-même est entouré de pièces évoquant les quartiers de ses anciens habitants.


À part le temple, il faut se l'avouer, il n'y a pas grand chose à faire à Thanjavur. D'un côté, c'est tant mieux, parce qu'on a été enrhumés tous les deux pendant nos quelques jours là-bas. Ce n'est pas une étape dont on se rapellera toute notre vie, c'est certain. Au moins les gens étaient sincèrement sympathiques, probablement parce que la ville est moins touristique justement. C'est bien ce qu'on retiendra de nos quelques jours; le vendeur de bananes qui nous en donnait tout le temps une de plus, idem pour le vendeur de sucreries... Celles-ci, ici appelées "sweets", sont un véritable régal. On en retrouve de toutes les sortes, le plus souvent des petites boules de pain trempées dans le sirop ou encore des carrés parfumés, sorte de version indienne du sucre à la crème! Il n'y a rien de mieux pour terminer un repas, et éteindre le feu que la nourriture épicée laisse en bouche...


Côté gastronomie, l'Inde du sud se démarque de l'Inde du nord autant par ce qu'il y a dans l'assiette que par la façon de manger. Les plats les plus populaires sont les thalis. En fait, le midi, il n'y a pratiquement rien d'autre de disponible. Vers 11h, les restos sortent leurs affiches et annoncent "meals ready". Ces fameux thalis consistent en une montagne de riz servie sur une feuille de bananier, avec divers accompagnements assez épicés aux légumes, comme du chutney, du sambar... La feuille de bananier, en plus de servir d'assiette peu chère et de rehausser l'aspect visuel du repas, apporte une saveur toute particulière aux aliments. C'est délicieux!

Dans le nord, les gens mangent avec les mains, mais timidement, du bout des doigts, avec une ou deux phalanges seulement. Dans le sud, où il y a de la gêne, il n'y a pas de plaisir! C'est avec la main au grand complet que les Indiens portent la nourriture à leur bouche et, bien qu'à priori cela semble très facile, il existe en fait toute une technique. Fred et moi, on pensait qu'on ne s'en sortait pas si mal, mais un midi un homme est venu nous dire qu'on "semblait avoir de la difficulté à manger"... Bref, un moment hilarant! Il nous a expliqué qu'on doit d'abord mélanger le riz avec les accompagnements, avec la main droite bien sûr, puis faire une boulette de riz avec le bout des doigts. Vient ensuite la partie plus complexe: il faut la soulever avec trois doigts, sans l'écraser, puis porter la main aux lèvres, un peu comme une cuillère. Le pouce sert alors de levier pour faire glisser la boulette dans la bouche. Ouf!

Après Thanjavur, on est parti pour Madurai, un peu à reculons. Je m'explique: après trois mois en Inde, on commence à en avoir assez. On était très enthousiastes après deux mois dans le nord, on se disait qu'un mois serait parfait pour faire le sud, mais on s'aperçoit qu'on a grandement surévalué... En fait, on part pour Pékin le 16 septembre, et d'ici-là, on se sent un peu coincés ici. Le Tamil Nedu, bien honnêtement, ça n'a pas de charme à nos yeux. Des temples, des temples, encore des temples... Heureusement qu'on a eu ces quelques jours à Mamalapuram sur la plage pour se remonter le moral. Bref, on a parfois l'impression de "faire du temps" ici, de poursuivre notre itinéraire sans grand intérêt. On est mûrs pour un changement. Vivement la Chine!

Madurai, donc. Son attrait principal est (roulements de tambours)... un temple, oui oui! La ville est construite autour du Sri Meenakshi Temple, qu'on s'est contenté d'observer de l'extérieur. On a commencé notre visite de la ville avec le Gandhi Memorial Museum. En fait, on s'est rendu compte, non sans gêne, qu'après trois mois en Inde on n'en savait toujours pas plus sur Gandhi, un des personnages les plus importants de son histoire. On a été agréablement surpris de voir que ce musée, gratuit, était très bien fait, avec beaucoup de détails et d'images. Tout un homme, ce Gandhi!