mercredi 15 septembre 2010

Rameswaram


Déjà, sur une carte, Rameswaram promet d'être un endroit unique. Installée sur une protrusion du continent indien, la ville est à quelques kilomètres de ce qu'on pourrait croire comme étant le bout du monde. Parce qu'elle est sur une île, qu'on s'y rende en voiture, en bus ou en train, le chemin est le même. Tout droit. En fonçant vers l'horizon bleu azur, on voit la mer d'un côté, puis de l'autre et bientôt, les deux côtés se rejoingnent par en dessous. C'est comme si, propulsés à vive allure, on avait raté le dernier arrêt sur la terre ferme et qu'on se dirigeait tout droit vers le Sri Lanka en flottant sur l'eau. Le Pamban Bridge est la seule chose qui nous sépare du fond.

Lentement, le train s'approche de l'autre rive comme une âme arriverait au paradis. De loin, on dénote les cocotiers, le sable blanc, quelques bateaux de pêcheurs ajoutant de jolies couleurs au paysage et bien sûr, la mer. Une fois sur place, pas de surprise. C'est tranquille. On est accueillis chaleureusement par le sourire des villageois. L'un d'eux nous invite à prendre le thé qu'on accepte volontiers.

À mesure que l'on approche du temple, on sent que l'activité s'intensifie. Le soleil est de plomb et on porte chacun un bon 15 kilos sur le dos. La marche est dure mais le rythme est bon. Une seule question, où est-ce qu'on pose nos valises? De ville en ville, à chaque nouveau déplacement, le dilemne est le même. Est-ce qu'on s'arrête au premier hôtel qui satisfait nos critères? Est-ce qu'on essaie de trouver celui recommandé par notre Guide du Routard, perdu au fond d'un labyrinthe de ruelles obscures? On opte pour la deuxième option. Cette fois-ci par contre, l'hôtel est facile à trouver, juste à côté du temple. Génial, il est complet. On revient sur nos pas et on en visite une demi-douzaine. Ils sont tous complets. Super. Ici encore, on en soupçonne quelques-uns d'accueillir seulement les Indiens, mais qu'est-ce qu'on peut y faire? C'est peut-être une faveur qu'ils nous font... On finit par trouver une chambre, pas trop loin du centre.

La difficulté à trouver une chambre, nous dit-on, s'explique par la tenue d'une célébrationdont j'ai oublié le nom. En effet, Rameswaram accueille plusieurs évènements par mois et rares sont les semaines où il ne s'y passe rien. En poussant les recherches un peu plus loin, on apprend que la ville est en fait le deuxième centre de pélerinage le plus fréquenté par les Hindous après Varanasi. En plus de venir se recueillir dans un gigantesque temple, plusieurs vont se baigner dans les eaux environnantes car elles sont considérées comme sacrées. Comme à Bénarès, on y trouve un ghât, escalier menant à l'eau pour faciliter les ablutions. Certains vont même jusqu'à transporter de l'eau prélevée directement du Gange jusqu'ici, dans un rituel censé leur attirer la grâce des dieux. Évidemment, avec autant d'affluence et de rituels de toutes sortes, la rive ne s'en sort pas indemne. Déchets, vêtements, sandales et autres détritus douteux s'entassent sur le bord de l'eau. Ce n'est pas très chic mais on commence à s'y habituer. J'ai l'impression d'être en Inde depuis un an maintenant.

Autre phénomène auquel on a l'habitude, les coupures de courant. Leur fréquence est très variable d'une ville à l'autre mais aucune n'est épargnée plus de 24h. Chacune amène son lot de désagrément. Le soir, évidemment, pendant la douche (au seau de surcroit), tout savonné, la salle de bain est soudainement plongée dans l'obscurité. Au resto, ne pas voir ce qu'il y a dans notre assiette peut être assez embêtant. C'est pas parce que c'est dedans que ça se mange... En marchant dans une ruelle sombre, en écrivant une entrée pour le blog sans l'avoir sauvegardée, en regardant un film (dans une des seules chambres avec télé qu'on ait le luxe de s'offrir), 20 minutes avant la fin. Les exemples pullulent. Merci à ceux qui nous ont offert des Maglites et des lampes frontales pour Noël. On s'en sert.

Les pannes de courants sont donc attribuables à des infrastructures déficientes (vous devriez voir les poteaux électriques ici). On pourrait ajouter un autre problème causé par ce même fléau soit l'évacuation de l'eau. On en a été témoins plusieurs fois, même la plus timide des averses peut inonder les rues en quelques minutes. N'ayant aucun système de drainage digne de ce nom, les rues deviendront bientôt des ruisseaux qui se mélangeront avec, vous avez deviné, les eaux d'égouts. Plus tard, une fois l'averse terminée, le tout formera de multiples flaques d'eau stagnante dans lesquelles les chiens errants iront s'abreuver. Ragoûtant, n'est-ce pas?

Petite anecdote sur notre visite du principal lieu de culte de Rameswaram, le Ramanathaswamy Temple. Celui-ci est particulièrement grand pour un temple planté au milieu d'un village et l'intérieur se décline en plusieurs salles et corridors dont un de près de 200 mètres de long. Il est facile de s'y perdre d'autant plus que certaines sections ne sont pas accessibles aux non-hindous. Parallèlement, plusieurs monuments indiens qu'on a visités commandaient un prix d'entré différent selon si on est indien ou étranger. Chaque fois, comme un mon'oncle jamais tanné de faire la même joke, on disait au guichetier : "Yes, yes, we're Indian. We don't look Indian to you?". Inspirée par cette petite farce plate, Joëlle a réussi à l'impensable. Nous sommes certainement les seuls blancs tanants à avoir eu droit de passage dans les salles réservées aux hindous. Devant le fait, alors que je me résignais à revenir sur nos pas, Joëlle dit tout bonnement au garde: "On est ici pour en apprendre plus sur la religion hindoue dans le but de s'y convertir.". J'en croyais pas mes oreilles. Surtout que j'anticipais un éclat de rire et un signe de la main d'aller voir ailleurs mais non! Il nous fait signe d'attendre, part en courant et revient avec de la poudre blanche dans la main. Avec le pouce, il nous en écrase sur le front et nous fait signe d'avancer. Wow, j'me suis jamais senti aussi scruté du regard depuis qu'on est ici, même après 3 mois. Les gens devaient vraiment se demander ce qu'on foutait là. Après 3-4 minutes, nous aussi. Comme il n'y avait rien de si particulier, à part des Indiens qui faisaient la file pour offrir des fleurs à Shiva, on est partis comme on est venus. En essayant de se faire discrets.

Finalement, je manque de mots, de temps et/ou d'inspiration pour vous parler de notre escapade au bout du monde, à l'extrémité de l'île. Tout ce que je peux vous dire c'est que non seulement l'endroit est fabuleux mais il y règnait aussi une ambiance particulière lors de notre passage. Un peu comme si l'on approchait du fameux précipice que l'on s'imaginait, dans l'ancien temps, quand l'Homme croyait que la terre était plate. Je vous laisse regarder les photos de cette entrée dont les quatres dernières ont été prises sur la plage de Dhanushkodi, village du bout du monde. Sur l'une d'elle, on voit très bien les fameuses huttes en feuilles de palmier, typiques de l'Inde du sud.

1 commentaire:

  1. Joelle, tu es une petite coquine! Je vous trouve bien drôle d'essayer de passer pour des Indiens! J'imagine bien Fred qui a écarquillé les yeux en entendant Joelle dire qu'elle voulait se convertir! ;)

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