mardi 20 juillet 2010

Agra et Varanasi

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"Welcome Youppi! Welcome Youppi!"
me dit un Indien dans le train vers Agra. Eh non, il n'était pas en train d'exprimer son grand enthousiasme vis-à-vis notre arrivéee ou encore en train de faire allusion à notre célèbre mascotte... En fait, c'est "Welcome U.P.", soit ça façon à lui de nous souhaiter la bienvenue dans l'état de l'Utter Pradesh. On a bien ri!

Agra est pour nous un passage obligé dans le nord de l'Inde. Traverser le coin sans même s'arrêter pour visiter le Taj Mahal serait comme une offense à l'Inde, qui s'enorgueillit de possèder l'une des sept merveilles du monde. La merveille a un prix, bien sûr, et à 750 roupies l'entrée par personne (pour les étrangers), c'est le monument le plus cher à visiter de l'Inde! On a bien essayé de faire croire au préposé que nous étions Indiens, étrangement, il ne nous a pas cru! Ces derniers ne paient que 20 roupies l'entrée, ce qui est tout à fait comprenable... Il serait absurde que leurs propres monuments leur soient innacessibles. N'empêche qu'on a réussi à décrocher un sourire au préposé, qui comme la plupart des Indiens a les dents brunies par les noix de bétel et le tabac à chiquer. Parlant de roupies, c'est à Agra qu'un commerçant nous a fièrement annoncé que le gouvernement indien venait tout juste d'octroyer un symbole à la devise (roulements de tambour): Indian Rupee symbol.svg. La roupie indienne peut maintenant se tenir la tête haute à côté des $, ¥, € et £ de ce monde... Jusqu'à maintenant, les gens l'abbréviaient Rs, Re ou bien INR. Le fait de rejoindre la cour des grands est un signe de leur croissance économique...

Pour en revenir au Taj Mahal, d'une hauteur imposante et tout en marbre blanc, il est prestigieux. Quand on sait qu'il ne s'agit ni d'un palais, ni d'un temple, mais bien d'un mausolée, ça ajoute drôlement à la démesure! La visite nous a encore une fois rappelé que l'Indien est un être grégaire. Ils ont besoin de se rapprocher, de se coller... Il est impossible en Inde d'aller s'asseoir sur un banc déserté au fond du parc pour avoir un peu de quiétude, ils sont attirés comme des aimants! La notion de "bulle" est quasi absente, ou dumoins ils ont leur bulle très très proche de leur corps. Ils tiennent à nous aborder, même si ce n'est que pour nous sortir les quelques mots d'anglais qu'ils connaissent. Un homme nous a dit, le plus sérieusement du monde, "India is a country". Tiens donc, tu m'apprends quelque chose!

Dans Taj Ganj, le petit quartier routard autour du Taj Mahal, on se fait constamment interpeller dans le but de nous attirer vers un hôtel ou un restaurant... Ils sont probablement plus insistants que d'habitude, on est dans la basse saison en raison de la température chaude et humide. Malgré toute cette tempête de rabbateurs et de conducteurs de rickshaws assoifés d'argent, on réussit plutôt bien à rester calmes et sereins. Parce que l'Inde, c'est ça. Les enfants qui courent et s'attroupent autour de vous, sans compter les vaches, les bouses de vache, les odeurs, les mouches, les chiens et les cochons sauvages. On ne peut que prendre une grande respiration et accepter ce qui nous entoure. Autrement, on serait malheureux ici.

C'est donc fort de ces belles pensées et de nos 7 semaines d'expérience en Inde qu'on a pris le train vers Varanasi, la fameuse ville sacrée bordée par le gange. Une ville mythique, qui figure dans le "top 10 des villes à voir avant de mourir" de bien des voyageurs! On était très enthousiastes à l'idée d'idée d'y passer quelques jours... Malheureusement l'expérience a été négative pour nous. Je vous épargne les détails, on peut résumer en disant que chaque personne qui nous a abordé, sans exception, l'a fait dans le but de nous arnaquer. Par exemple, toutes les personnes à qui on a demandé des indications ont essayé de nous perdre.

Le soir venu, on a assisté à la Puja, une cérémonie traditionelle consistant, entre autres, en plusieurs chants sacrés et en l'offrande de la lumière au gange. C'était beau, c'était solonnel, mais il y avait quelque chose qui ne fonctionnait pas pour nous. On ne ne se sentait pas à notre place. C'est leur fleuve sacré. Leurs cérémonies. Tous ces touristes dans des petites embarcations sur le gange... Ça sentait le voyeurisme. Idem pour les crémations sur les ghâts (ces séries d'escaliers menant au gange). Pour les Hindous, incinérer un corps puis le jeter dans le gange est l'ultime façon d'en disposer, puisque l'âme du défunt échappe ainsi aux cycles de réincarnation et peut aller directement vers le nirvana. Mais que diriez-vous si de parfaits étrangers assistaient aux funérailles de votre mère? Qu'ils prenaient des photos du corps? On n'a pas du tout aimé l'ambiance qui y reignait. On ne ne sentait carrément pas à notre place. C'est sans mentionner l'horrible et inoubliable odeur de la chair humaine qui brûle.

Varanasi, c'est aussi tout ce qui dérange nos principes d'occidentaux en l'Inde, élevé à la puissance 12. Le bruit, partout, tout le temps. Les déchets, les crachats, les excréments d'animaux et d'humains qui jonchent les rues. La saleté du gange, hyper pollué, avec en prime des restes humains qui flottent (le bois pour les crémations coûte cher, et certaines familles ne peuvent pas se permettre d'en acheter assez pour brûler le corps au complet). Les Indiens qui s'y baignent allègrement, la bouche ouverte. Les cages à poulet dans la rue, les vaches dites sacrées attachées au même point des heures durant, laissées à elles-mêmes sans eau et pataugeant dans leurs excréments. Je ne sais plus combien de fois j'ai dû retenir mes élans d'activiste PETA et m'empêcher de libérer ces pauvres bêtes. Bref, une ville qui donne envie de sanglotter, recroquevillé sur le lit de sa chambre d'hôtel miteuse. On en a même carrément oublié de manger pendant plusieurs heures. Varanasi a eu raison de nous. On a craqué.

Après à peine 24h passées dans la ville, on a cédé à l'irrépressible pulsion de filler à toute allure vers la gare et de supplier le préposé de nous trouver un billet pour Calcutta. Nous avions déjà des réservations dans le train du lendemain au soir, mais 36h de plus dans ce foutu bordel étaient hors de question. Il nous a trouvé deux places dans un train qui partait quelques heures plus tard.

Il faut dire que même quitter Varanasi n'a pas été facile! En attendant le train à la gare, je bavardais avec une jeune Française pour passer le temps. C'était agréable, jusqu'à ce qu'un Indien s'installe à 2 mètre de nous et commence à se masturber. En plein jour, sur le quai! Pendant ce temps, Fred avait des démêlés avec un policier parce qu'il a osé pousser un homme qui lui marchait sur les pieds... Finalement, notre train a eu plusieurs heures de retard en raison d'un grave accident un peu au nord de Calcutta. N'empêche qu'on est drôlement contents de ne pas s'être retrouvés dans ce train-là. Ces accidents, qui sont plus fréquents en Inde qu'ailleurs, ce n'est rien de bien rassurant pour nous qui voyageons beaucoup par train... Il suffit de ne pas être au mauvais endroit au mauvais moment j'imagine. On ne peut quand même pas s'empêcher de voyager par peur de contribuer aux statistiques...

Heureusement qu'on a passé du bon temps ailleurs en Inde du nord, dont Varanasi n'est pas représentative du tout. Je voudrais quand même terminer cette entrée du blog sur une note plus positive. Le fait de passer à travers des moments difficiles nous fait vraiment réaliser la chance qu'on a d'être nés au "bon endroit". On prend pleinement conscience du confort qu'on avait dans notre chez-soi. On s'ennuie de nos draps propres, de Robin couché en boule à nos pieds, en ronronnant, de nos petits soupers sur le balcon, de faire la cuisine, de boire un bon verre de vin... et j'en passe. Tous ces petits plaisirs simples de la vie nous semblent tellement précieux maintenant! J'encourage tous ceux qui lisent ces lignes à prendre un moment dans leur journée pour réaliser à quel point ils sont chanceux. Regardez ce qu'il y autour de vous jusqu'à ce que vous ne puissiez vous empêcher de sourire...

3 commentaires:

  1. Je vous aime les amis, je m'ennuie...

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  2. Miss you guys so much!

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  3. Tu as raison Joelle.
    Notre style de vie est assez luxueux - surtout comparé à la majorité de la population sur la terre. On est très chanceux, même avec nos "bad days"...
    Claudia xox

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